The Legend of Zelda : Link’s Awakening

Retour sur l'Île Cocolint

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Aussi loin que remontent les souvenirs de mon enfance, je me vois très régulièrement en vacances chez mes grands-parents, à bricoler dans mon « atelier », une énorme cage à oiseaux reconvertie en repère privé, avec pour activité première de démonter des magnétoscopes ou autres appareils défectueux pour voir comment ça fonctionnait, ou bien m’exploser aléatoirement les yeux sur une télévision cathodique en compagnie d’une Nintendo Entertainment System et des éternels Mega Man 3 et Super Mario Bros. 3, ou tout simplement sur ma bonne brique de Game Boy, habillée d’une superbe protection en caoutchouc qui lui donnait un fessier plutôt cocasse. Pas mal de jeux sont passées entre mes mains, et avec eux, pas mal de bons moments avec, pour n’en citer que quelques uns, Wario Land, Trax, Kirby’s Dream Land, Solomon’s Club, et surtout, surtout… The Legend of Zelda : Link’s Awakening. Et pour cette semaine spéciale coup de cœur rétro, je pense qu’il fallait bien que cela de lui que je parle, tellement j’ai adoré ce jeu à l’époque, tellement j’avais passé du temps dessus, tellement il est associé à mon enfance, et tellement j’avais déjà conscience du petit bijou avant-gardiste qu’il était hier et que je considère qu’il est toujours aujourd’hui. Dans la célèbre et déjà populaire série de Nintendo, la petite cartouche demeure encore pour moi la précurseure du Zelda « alternatif ». 4mbits d’ambition qui bousculèrent les codes pourtant déjà bien posés depuis trois épisodes sur consoles de salon. Avec deux trois anecdotes pour pousser, revenons – pour la dix-millième fois sur internet – sur ce grand classique de l’aventure portable, avec une bonne dose de nostalgie et pourquoi pas un peu d’analyse. Il a été difficile de savoir comment j’allais aborder la chose, donc le papier sera un mix entre une critique déjà lue facilement assimilable à un « 5 étoiles – Game of the Millenium », 3615 Ma Vie, et notre jeune rubrique Mémoire-Vive, dont je vais m’empresser de dépouiller le concept. Il va sans dire que les prochaines lignes contiennent moult spoilers, tant les thématiques abordées et liées à l’histoire auront besoin d’être citées, donc garde à vous.

Pour un jeune VOYOU ne pouvant posséder qu’un(e) Game Boy et une NES vieillissante étant donné l’amour que portaient ses parents sur les jeux-vidéo, l’annonce d’un épisode portable d’un The Legend of Zelda était une sorte d’événement en soi, surtout quand les amis jouaient déjà au troisième épisode sur leur toute belle Super Nintendo. Quand on regarde en arrière, au tant que la DS et 3DS n’existaient pas, avoir une aventure de Link dans sa poche, c’était un truc génial quoi ! C’est un peu l’idée qu’a dû traverser les esprits des développeurs chez Nintendo, qui travaillaient durant leurs heures creuses sur une adaptation monochrome de A Link to the Past… Au fur et à mesure que le projet progressait, ce qui était au départ un petit titre fait sur le pouce devint un véritable jeu, et au final bien un nouvel épisode. Et quel épisode! Personnellement se fût le premier que j’ai parcouru et terminé donc voilà pourquoi il occupe une place particulière dans ma vie de joueur… Mais pas que, comme nous verrons plus bas. Après avoir vérifié la bonne tenue des 4 piles LR6 et inséré la belle cartouche dorée dans la console, il est tant d’allumer la bête et de partir à l’aventure… Non sans avoir réglé le contraste et mis la musique à fond.

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A peine la console Game Boy termine de balancer son célèbre et perçant “TUDING!”, nous sommes directement projetés dans l’histoire par une impressionnante introduction. Nous retrouvons Link, bien en difficulté au milieu d’un océan déchaîné. Il est accroché tant bien que mal au mat de son bateau, malmené par les vagues et l’orage qui sévit assidûment. Il ne faudra pas longtemps pour que la tragédie survienne : un éclair frappe l’embarcation, réduisant cette dernière en miette. Notre héros inconscient dériva jusqu’à échouer sur le plage d’une petite île, où il fût trouvé et recueilli par une jeune fille prénommée Marine et son père Tarkin. Ceux-ci lui apprend qu’il a débarqué sur Cocolint, et que depuis qu’il est arrivé sur leur île, de nombreux monstres agressifs rodent dans les parages. Après avoir récupéré son bouclier « C’est le tien parce qu’il y a ton nom dessus ! », notre cher Link part à la recherche de son épée, ce qui va lui amener à rapidement rencontrer le grand hibou, qui va nous expliquer notre quête : il s’agira de récupérer huit instruments disséminés dans des donjons ardemment gardés. Leur but une fois tous réunis ? Réveiller le Poisson-Rêve, qui permettra à Link de quitter l’île… Mais cela ne sera pas sans conséquences. Cet épisode portatif se distingue ainsi de ses comparses sur consoles de salon et sera une sorte de pied de nez aux histoires de la série jusqu’à la sortie du superbe Majora’s Mask, puisqu’il ne s’agira pas pour Link d’aller sauver la princesse Zelda du terrible de Ganon, mais bien de sauver sa propre peau. L’univers ne prend pas non plus place à Hyrule mais bien à l’extérieur de celui-ci, au beau milieu de l’océan, avec de nouveaux personnages et quelques références aux autres titres de la série, mais aussi du monde Nintendo. L’univers était chouette, et le reste encore aujourd’hui. L’aventure se déroule quant à elle de manière classique avec un enchainement de donjons et plusieurs quêtes pour accéder aux dits donjons ou pour récupérer une arme plus puissante, avec cette histoire de coquillages. Un Zelda 3 dans la poche en somme, avec un gameplay pensé pour la Game Boy et ses quelques boutons. Pas vraiment de demoiselle en détresse donc, mais tout un tas de gens qui auront besoin ou qui aideront Link dans sa quête… Sans pour autant oublier les parties de pêche et cette excellente quête qui consistait à échanger des objets pour en obtenir un indispensable à la fin du jeu, je retiendrais surtout (mais pour commencer) ce sauvetage épique et incompréhensible de « Toutou » (à droite), « chiennappé » par des voleurs pour on ne sait quelle raison, et qui s’avèrera une arme bouffe tout absolument hilarante avec ses pulsions sanguinaires pour tout ce qui qui méchant, avec le son « GNIARP » qui va avec. Mais le moment que j’ai toujours préféré reste cette petite histoire d’amourette entre Link et Marine, naïvement affichée sur 256×256 pixels, avec ce dialogue mémorable devant la mer, notre héros qui tient à bout de bras la demoiselle, et toute cette balade dans Cocolint qu’on aurait voulu faire durer plus longtemps. C’est d’ailleurs au cours de ces petites parties de dialogues, que cela soit avec Marine ou les boss, qu’on commence à se douter que quelque chose ne va pas dans notre quête… Jusqu’à la lecture d’une fresque dans un temple… Tout ceci… Ne serait qu’un rêve ?

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Je me souviens parfaitement quand j’ai terminé la première fois Link’s Awakening. C’est assez cocasse parce que c’était en plein dans une fête de quartier de ma ville, et on ne va pas dire que la musique ambiante, composée entre autres des tubes des Musclés, Bézu ou encore Licence IV (« La fête au village », « La Queuleuleu », ou encore « Viens boire un p’tit coup à la maison »), avec tout un tas de gens qui dansent, n’a aidé à vraiment « apprécier » ce qu’il se déroulait sur mon écran monochrome. La quête de Link se termine en effet de manière assez directe et sans appel, et ce malgré les nombreux indices doucement distillés durant l’aventure. Tout l’île de Cocolint n’est en effet qu’un rêve, une matérialisation des songes du Poisson-Rêve, victime d’une force cauchemardesque qui était bien décidé à le maintenir endormi jusqu’au moment où Link, lui aussi pris au piège dans ce monde éphémère, décida de mettre son grain de sel et de tout saborder. Sauf que réveiller le Poisson-Rêve signifie la disparition de l’île et ses habitants. Même si ce dernier tempère un peu, je ne trouve pas spécialement que cet épisode portable offre un Happy Ending comme dans la majorité des jeux-vidéo… Bien au contraire. Encore aujourd’hui, je ne peux être que stupéfait de la froideur de la séquence finale. On ne peut qu’assister, avec tristesse, tout ce monde s’évaporer. Plus de Marine, plus Tarkin, plus ses enfants-qui-ne-savent-pas-trop-parce-qu’après-tout-ils-ne-sont-que-des-gosses. Bien ! Super. Ça donne la banane quand même. Bordel quand même quelle fin émouvante. 20 ans plus tard, ça m’en donne encore des frissons. Il faut dire que la musique y est beaucoup pour quelque chose… Avec un environnement qui permet de l’apprécier, bien entendu). Que cela soit pour cette partie ou pour l’ensemble du jeu, on va dire sans rougir que les compositeurs ont poussé les capacités de la Game Boy à un point qui ne sera dépassé que par les compositeurs de chiptune, bien des années plus tard. Il en est de même pour les graphismes, tellement magnifiques et fins pour cette époque, avec une technique quasiment irréprochable (en gros, ça rame très peu), qui s’associent et propulsent tellement l’univers et le gameplay. Ce dernier reste encore excellent aujourd’hui, et s’avère nettement plus précis qu’un autre jeu du même dont je ne peux pourtant que vanter que les mérites, surtout pour avoir précédé ce Zelda dans le concept de l’Aventure avec un grand A sur Game Boy : Mystic Quest, véritable premier épisode de la série des Mana, avec sa brutale traduction française (« BATS TOI ! »), et ses hit box de la mort. Mais pour moi ces deux jeux ont vraiment des qualités qui leur sont propres. J’en reparlerai peut être un jour tiens. Le jeu fût donc un succès, et amènera personnellement dans mon entourage une sorte d’aura magique et pas mal de naïveté. Il y avait cette pseudo rumeur comme quoi il existait un monde secret, à la manière du Dark World dans A Link to The Past, qui était caché sous la terre de cochon en pierre située quelque part dans l’île de Cocolint. En l’absence d’internet à cette époque, il était difficile de vérifier cela, si bien que pendant quelques semaines, chacun y aller de sa théorie pour déterminer le moyen d’accéder à ce monde. En vain, bien évidemment, même si quelques années plus tard, sortira la version « DX« , apportant, en plus de la couleur et d’une fonctionnalité rigolote d’impression d’images via la bruyante Game Boy Printer, un nouveau (et court) donjon. Après, peut être que cette rumeur était peut être vraie… Récemment, j’ai découvert sur YouTube que faire des bombes-flèches n’était pas le seul truc amusant à faire en profitant d’erreurs de programmation. On n’arrête pas le progrès.

Petite cartouche, grande aventure. The Legend of Zelda : Link’s Awakening est et restera pour ma part un grand classique de la Game Boy et l’ambassadeur du Zelda « alternatif » où sauver une princesse ne sera pas au programme. Aussi bon dans le fond que dans la forme, cet épisode portable offre un univers percutant, un gameplay précis et des musiques magnifiques. De plus, il aborde un thème encore assez rare aujourd’hui, et ne se plie pas aux protocoles qui consiste à balancer aux joueurs une fin quelque peu heureuse. Et pour ça, il restera éternellement un de mes jeux préférés.