Tintin au Tibet

Sapristi Capitaine ! Nous sommes aussi sur Game Boy !

Genre
Plate-formes
Développeur
Bit Managers
Éditeur
Infogrames
Année de sortie
2001

Encore sujet de railleries plutôt justifiées, les adaptations vidéoludiques signées Infogrames de bandes-dessinées franco-belges, avec celles de Tintin notamment, ont été aussi marquantes visuellement, avec une très souvent une superbe reprise de l’esthétique du matériel originel, que sur le plan du gameplay, proposant une difficulté fréquemment injustifiée, des contrôles patauds et des situations maintes fois abracadabrantesques. Cependant on oublie parfois que si la société développait en interne les moutures sur consoles 16 bits, les versions 8 bits étaient traditionnellement confiées à d’autres compagnies, l’espagnol Bit Managers en particulier, avec une résultante plus que positive dans bien des cas, Les Schtroumpfs en étant le parfait exemple, mais aussi, dans une moindre mesure, les portages du bien retors Tintin au Tibet, sur Game Boy et Game Gear en 1995, ressorti sur Game Boy Color courant 2001. En effet, et malgré une reprise presque trait pour trait du contenu des cartouches pour consoles de salon, ces adaptations parviennent à en gommer quelques défauts. Enfin… Disons que la purge est moins abrasive.

Tout comme ses confrères sur Super Nintendo et Mega Drive, cette version portative reprend dans les grandes lignes la trame du vingtaine album des aventures de Tintin, où le célèbre reporter s’engage dans une quête franchement désespérée pour retrouver son ami Tchang dont l’avion s’est écrasé dans les montagnes du Tibet. Le choix de cet album pose encore question compte tenu du ton et l’ambiance à milles lieux des autres péripéties du héros à la houppette et son acolyte canin, mais l’absence d’armes et la topographie tortureuse des reliefs enneigés en faisaient sans doute une base solide pour un jeu de plateformes adapté à un jeune public.

Mais si Infogrames puis Bit Managers se sont attachés à suivre l’intrigue de l’aventure dessinée, une bonne partie de cette dernière ne se déroule pas dans les montagnes escarpées de l’Himalaya. Pas de problèmes : le jeu Tintin au Tibet sera un plateformer avec des dangers, même durant les moments où notre héros mènera son enquête dans tout ce qu’il y a de moins malfamés comme lieux. Les quatre premiers niveaux sont assez déstabilisants : on se retrouve pour les deux premiers en plein Lotus Bleu, à échapper à des paquets balancés d’un train à l’arrêt, puis à remonter un torrent à la nage pour sauver Tchang. Les deux suivants ? Dans l’Hôtel des Sommets en France et les rues de Katmandou, à se (faire) balader pour trouver des infos, avec des serveurs armés de leurs vils plateaux et des poules enragées qui peuvent nous tuer en quelques coups. Et pas question de se défendre !

Fort heureusement, cette idée du danger de chaque instant s’améliore par la suite, les niveaux suivants se déroulant à la montagne avec davantage de plateforming et bien, bien plus de pièges, ou il s’agira toujours de partir d’un point A pour atteindre un point B tout en survivant. Les moutures portables reprennent pour ainsi dire le même level-design et globalement, la même difficulté au couteau, avec des objets balancés à notre tronche un peu n’importe quand, une interprétation parfois assez injuste de la réception d’un saut, et une exigence certaine quant aux timings serrés. Et évidemment, aucun moyen de défense voire d’esquive si ce n’est que d’avoir de bons réflexes. Bon, rien n’est insurmontable, bien au contraire, les tableaux étant relativement courts et les contrôles plutôt coopératifs, même si l’on s’énervera souvent contre Tintin avec son agaçante inertie en fin de course ou sa capacité à ne pas prendre ou déposer un objet.

Choses assez positives : quelques coupes drastiques ont dû être faites au niveau du gameplay compte tenu des limitations évidentes des supports portatifs. Ainsi, les séquences où il fallait alterner entre différents plans afin d’échapper à certains « dangers » ont été supprimées, et le niveau d’escalade avec le capitaine Haddock s’est vu délaissé de ce dernier : Seul Tintin devra gravir l’horrible paroi, et bien moins longtemps. Ajoutons qu’avec l’arrivée de la version Color, davantage de mots de passe ont été ajoutés dans la cartouche, rendant l’aventure moins ardue. Malheureusement, le passage à énigmes dans la lamaserie n’aura pas cependant été revu : il demeure un moment ce même moment de frustration avec ses jeux musicaux ignobles qui doivent être recommencés dans leur intégralité en cas d’échecs consécutifs, une erreur retirant un point de vie.

Notons que techniquement, tout comme sur le plan de la maniabilité, Bit Managers convainc encore avec un jeu techniquement irréprochable pour du jeu à emporter. Nous sommes bien entendu loin du niveau du niveau de détails balancés par les énormes sprites des moutures Super Nintendo et Mega Drive, mais les portages Game Boy, Game Boy Color et Game Gear se défendent notablement bien, proposant des décors fouillés, plus ou moins colorés selon le support, avec des transitions entre chaque niveau illustrées par des écrans fixes aux styles très proches de la bande-dessinée, limitations de la machine en toute considération, Tintin se baladant par exemple constamment en polo, sans bonnet, en pleine tempête de neige. Bit Managers oblige, le compositeur Alberto José Gonzalez est une fois encore aux commandes de la musique, avec ici non pas une œuvre originale mais la reprise des compositions de Fabrice Bouillon-LaForest et Emmanuel Régis, avec un rendu extrêmement réussi et bien, bien plus intense que sur les cartouches 16 bits.

Tintin au Tibet
Appréciation
Tintin au Tibet en version portative reste, malgré quelques ajustements (bienvenus) dûs au support nomade, un joli challenge qui pourra parfois agacer, mais peut-être pas autant que sur Super Nintendo ou Mega Drive, où Infogrames avait imposé une difficulté globalement ignoble et injuste. Bit Managers, plutôt habitué à faire les choses de son côté, s’est attaché ici à faire rencontrer le contenu des supports 16 bits sur une toute petite cartouche, avec une réussite certaine, surtout sur la musique, et offre ici une aventure qui s’avère plus envisageable, pour le peu que l’on s’accorde un peu de patience. Leur interprétation du Temple du Soleil, sorti quelques années plus tard, suivra le même cahier des charges, ce qui est tant mieux !
Points forts
Portage réussi
La bande-son
Moins ardu que sur Super Nintendo/Mega Drive
Points faibles
Encore des moments agaçants