Longtemps restée confidentielle, la série des Atelier est arrivée, petit à petit, à se faire un nom en dehors du Japon. Bien que reprenant une certaine formule, chaque titre a essayé d’apporter sa pierre à la série, certains innovant complètement comme Atelier Firis et son monde ouvert. Fort du meilleur démarrage d’un épisode de la série, Atelier Ryza espère bien moderniser encore davantage la recette – sans jeu de mot. Donnons-lui sa chance.
Ryza veut ton billet
Et il commence particulièrement bien en nous présentant Ryza, une jeune adolescente. Plein d’entrain, elle ne rêve que de s’extirper de son village natal, insulaire, et partir à l’aventure. Pour cela, elle embrigade ses deux meilleurs amis, Lent et Tao, le premier, costaud soucieux d’apprendre à se battre, le second, froussard mais passionné par les langues oubliées. Tous trois vont se mettre en tête d’aller visiter les abords du continent. Leur chemin croise très vite celui de Lila et Empel, deux voyageurs, venus enquêter sur les ruines d’anciennes civilisations apparemment très présentes sur l’île Kurken. Ils tomberont très vite sous le charme de Ryza, véritable bout-en-train, déterminé et personnage réellement attachant de l’aventure.
Attendez-vous à rapidement faire connaissance avec les habitants de l’île. Et à être spectateur régulier des multiples querelles familiales ou de voisinage pendant la première moitié de l’histoire. Atelier Ryza y prend son temps pour bien asseoir la vie de la petite communauté. Rafraîchissant, mais lassant. Heureusement, en seconde partie, l’aventure se lance enfin réellement. C’est alors un tableau autrement plus sombre avec des thématiques plus marquées qui prend enfin place jusqu’à la quarantaine d’heures de jeu nécessaires pour observer le générique de fin. Si cela était déjà vrai pour des épisodes précédents, celui-ci se repose entièrement sur son héroïne. Ses deux comparses sont aussi peu intéressants l’un que l’autre malgré de vaines tentatives d’épaississement. Ne parlons même pas de Klaudia, inutile, aussi bien pour l’histoire que pour la progression. Il est tout à fait possible de finir l’aventure sans jamais l’intégrer à l’équipe (véridique).
Ryza, muscle ton jeu
Pourtant, le système de combat de cet Atelier se veut bien plus palpitant que les précédents. Le temps s’y écoule en permanence, il faut agir et réfléchir vite et bien. Vous ne dirigez qu’un seul protagoniste à la fois, les autres sont dominés par l’IA (comprendre : ils attaquent). Il est possible d’attaquer, faire appel à une technique, utiliser un objet ou bouger. Si mouvement, ce sera forcément latéralement, le choix de la profondeur étant bloqué par le rôle du personnage. Trois membres de l’équipe sont offensifs, trois membres sont défensifs. L’attaque permet, certes de faire des dégâts à l’adversaire mais, surtout, remplit la jauge de Tactics, par défaut à zéro. Un coup, un point. A dix points, il est possible de passer au niveau suivant. Tous les personnages se mettront, alors, à frapper deux fois à chaque attaque, la jauge repartira de zéro et le prochain palier sera à vingt points. Le cinquième et dernier niveau permet le lancement d’une ultime technique, dévastatrice, mais réinitialise le niveau de Tactics.
Il ne sera pas toujours aisé de monter son niveau de Tactics puisque les techniques en consomment les points. Leur intérêt, outre leur faculté à occasionner plus de dégâts, est de descendre plus rapidement la jauge de défense adverse. Outre la barre de vie, chaque participant au combat – équipe comprise donc – possède une barre de défense qui, une fois descendue à zéro, provoque un état de “Break”. Autrement dit, il est dans les vapes pendant quelques tours. Les attaques spéciales des ennemis ont tendance à provoquer cet état dans vos rangs. Lorsqu’ils se concentrent en prévision de ce moment, une pression sur R2 permet de déclencher une capacité (ou un objet), hors tour du personnage sélectionné, moyennant un nombre certains de points de Tactics, pour désamorcer la situation. La capacité sera épaulée par deux autres, gratuites, des autres combattants.
L’ensemble, combiné, offre à Atelier Ryza un système de jeu particulièrement dynamique. Les affrontements durent rarement très longtemps, même face aux sacs à PV que la fin de l’aventure et le post-game réservent. Le plus compliqué à gérer – en dehors de la réactivité nécessaire – est l’utilisation limitée d’objets. Les objets sont en nombre illimité. Fait rare. Cependant, leur utilisation en combat consomme un ou plusieurs points de charge, le stock plafonnant à dix – jusqu’à quinze pour les fans de quêtes annexes. Les restaurer demande de se reposer à l’atelier. Autant dire que les combats sont relativement courts, et faire en sorte qu’ils le restent est une nécessité pour votre survie. Un échec vous ramène toutefois à l’atelier, avec seulement quelques objets de votre inventaire en moins. Atelier Ryza n’est clairement pas un jeu punitif.
Ryza instructions, it’s important
Atelier Ryza vous demande toutefois d’être curieux et de bien vous préparer. Très tôt, Ryza découvre l’alchimie et vous, à travers elle, le nouveau système proposé. Un système aussi ambitieux qu’il est simple à saisir : chaque recette est un petit arbre demandant d’utiliser des matériaux pour accéder aux feuilles. Chaque ingrédient apporte un niveau de qualité – important d’avoir des matériaux aux niveaux homogènes – et des traits. L’objet final pourra être associé à trois traits parmi ceux de ses ingrédients. La répétition des mêmes traits augmente le niveau du trait. Critical LV3 + Critical LV3 = Critical LV6. Évidemment, le nombre d’ingrédients est limité, et il faut parfois privilégier certaines branches de l’arbre, toutes ne pouvant être utilisées. Régulièrement, les feuilles permettent de découvrir de nouvelles recettes. En plus de celles apprises en cours de route, chez les marchands et au travers de quêtes annexes.
Plus Ryza synthétise d’objets, plus son niveau d’alchimie augmente, débloquant, avec lui, davantage de recettes. Plusieurs systèmes gravitent autour de cette alchimie. Il est possible de transformer des matériaux en gemmes, ce qui permet d’utiliser le stock superflu. Ou encore de continuer la synthèse d’un objet après sa création, l’Item Rebuild, grâce notamment aux gemmes précédemment obtenues. Un appareil à multiplication d’objet fait aussi son apparition en cours de route, et ainsi éviter de s’arracher les cheveux à retrouver des matériaux rarissimes. Les armes peuvent être forgées et, ainsi, fortement améliorées. Vous aurez même accès à un mini-créateur (automatique) de niveaux, pour du farming. Cette dernière fonctionnalité, fait notable dans la série, amène la possibilité de partager en ligne, via un code, les niveaux générés. D’autres joueurs peuvent alors découvrir votre mini-niveau et farmer, comme vous.
Pour récupérer tous les ingrédients nécessaires, il faudra arpenter les donjons du jeu – tout emplacement autre que le village. Au départ seulement équipée d’un bâton, Ryza pourra créer ses outils et récupérer toujours plus d’ingrédients. Filet à insectes, marteau, canne à pêche et autre serpe sont au rendez-vous. Les ingrédients issus d’un rocher, par exemple, ne peuvent être obtenus que par l’intermédiaire de la hache, du marteau ou de la bombe. Plus vicieux : selon lequel, parmi les trois, vous utilisez, et selon son niveau de qualité, les ingrédients collectés diffèrent. Heureusement, un guide des matériaux, accessible dans le menu, vous rappelle ce genre d’informations.
Ryza mes blagues (mais pas trop)
Parcourir un Atelier amène un temps certain à créer des objets et améliorer son équipement. Ne comptez pas sur les marchands pour vous proposer des armes et armures dignes de confiance : n’y voyez que du dépannage. Ceci est très symptomatique de la série : ce ne sont pas de grandes fresques épiques. Comme abordé précédemment, le jeu prend son temps pour planter le décor. Il multiplie les annexes pour apprendre à connaître les membres importants du village. Malheureusement peu intéressantes – mais importantes pour leurs gains – les quêtes secondaires vous amènent à suivre le destin de plusieurs villageois, se débloquant au fil de votre progression.
De même, le terrain de jeu est loin d’être gigantesque. Les zones sont plus ouvertes que dans un Atelier Shallie, mais n’égalent pas celles de Firis : vous n’y êtes pas à l’étroit mais vous ne vous y perdrez pas non plus. Ils sont essentiellement habités par des monstres, visibles sur le terrain, et n’abritent pour ainsi dire pas d’à-côtés. Heureusement, l’ensemble est très agréable à l’oeil. Le bon technique est palpable, sur Playstation 4. Notez que sur Nintendo Switch aussi, par rapport à l’immonde portage de Lydie & Suelle, mais sur grand écran, la version sur console Nintendo affiche tout de même un sacré downgrade. Même si le très agréable coup de crayon de Toridamono (RPG Maker MV, Chain Chronicle) se ressent quelque soit la version.
Atelier Ryza est d’ailleurs un titre qui s’apprécie pour ce qu’il dégage. Bonne humeur, entrain et joie de vivre, le tout essentiellement communiqué par Ryza. A l’inverse de jeux précédents, elle ne verse pas spécialement dans l’humour, mais juste ses dialogues et sa doubleuse (Yuri Noguchi) lui donnent une âme. Même si le scénario s’obscurcit, n’être jamais pressé et baigner dans cette ambiance à la fois simple et relaxante donne le sourire. Sans grand manichéisme ou tentative de message universel caché. Un plaisir à parcourir.