Elden Ring

Un anneau pour les gouverner tous

Genre
Action-RPG
Développeur
From Software
Editeur
Bandai Namco
Année
2022

Il n’y aura pas de Dark Souls IV. Ainsi se concluait la critique de Dark Souls III sur Archaic.fr. Nous en étions persuadés, surtout au vu des fins du jeu. Pourtant, From Software a réussi à créer le digne héritier des Souls : Elden Ring. Un jeu à l’ambition folle puisqu’il consiste à apporter la qualité de level design et de gameplay de la célèbre série du studio au sein d’un monde ouvert. Xenoblade X et Breath of the Wild ont su démontrer l’expertise des japonais dans ce genre. Miyazaki et ses équipes ont décidé d’apporter leur pierre à l’édifice. L’entreprise était risquée, et pourtant, encore une fois, From Software semble surnager dans sa catégorie.

Tout débute comme dans un Souls. Une scène cinématique présente l’histoire et ses protagonistes. Des textes mystérieux, de nombreux noms, un univers prenant place dans l’Entre-Terre. Elden Ring nous raconte les affrontements entre les demi-dieux, face à l’accession au pouvoir du Cercle d’Elden. Comme à chaque fois, From Software nous dépeint un monde ravagé, profondément sombre et anxiogène dans lequel apparaît un sans-éclat béni par la grâce (nous). Visiblement seul être capable de mettre un terme au cycle immuable désormais en place. La création du personnage nous permet de personnaliser un maximum notre avatar : l’éditeur n’a jamais été aussi poussé. Pourtant, impossible de créer un héros ou une héroïne au physique avantageux. Mais les joueurs expérimentés le savent : à quoi bon puisque la majeure partie de l’aventure se fait casquée ? Aucun trait physique n’interviendra d’une quelconque façon dans le plaisir de jeu. En revanche, la classe, si. En tout cas, lors des premiers pas dans l’aventure. Elden Ring propose de choisir parmi dix classes. Vagabond, guerrier, héros, mage, bandit, samouraï, il y en a pour tous les goûts. Certaines sont plus orientées corps à corps, quand d’autres à distance. Magie ou dégâts physiques ? Force ou Dextérité ? Chaque classe détermine une façon de jouer légèrement différente. Rien ne sera immuable puisque très vite, il nous sera possible de placer nos points de compétences (1 par niveau) sur les statistiques de notre choix, orientant ainsi notre classe. Sans compter qu’il sera possible, à un moment du jeu, de renaître si nécessaire, à savoir ré-allouer l’intégralité de nos points.

Le jeu nous en met plein la vue dès les premières minutes.

Les premiers pas sentent, eux aussi, le terrain connu puisque nous démarrons face à un monstre, qui nous occis en quelques secondes – normalement. Comme à chaque fois, la mort n’est pas une finalité, mais une étape dans le cycle de la vie. Ainsi, nous renaissons un peu plus loin, en Nécrolimbe, au sein d’une grotte qui sert de tutoriel. Les premiers pas sont plutôt simples. Les ennemis se veulent très accessibles, et même le premier boss – qui deviendra très vite un ennemi lambda – peut être neutralisé en quelques coups bien sentis. Vraiment, Elden Ring se révèle plutôt accueillant. La sortie de la zone de tuto nous met face à l’immensité du monde d’Elden Ring. Les paysages s’étendent à perte de vue. On se risque à penser que tout ce qui est discernable à l’horizon pourra être foulé. Spoiler : c’est le cas. Bien que la liberté sidère, nous suivons très vite les sites de grâce. L’équivalent des feux de camps des Dark Souls. D’autant qu’ils nous indiquent la direction à suivre, un immense château se dessinant au loin. L’open world peut également nous amener à faire de mauvaises rencontres, telles le cavalier près de la première église. Comme il peut nous entraîner à visiter des grottes et catacombes à l’extrême opposé de la direction des sites de grâce. Très vite, la liberté amenée par Elden Ring pousse à l’exploration. Et les joueurs et joueuses comprennent tout aussi rapidement que la curiosité est systématiquement récompensée. Que ce soit une pierre de forge, un équipement, un objet rare. Visiter l’Entre-Terre débloque toujours un petit plus.

Melina vous accompagnera tout au long de l’aventure.

Notre progression est d’ailleurs constituée de petits plus, une nouvelle arme par-ci, un bouclier par-là, un casque ou encore un talisman. Ces derniers permettent d’ajouter des bienfaits tels que plus de vie, davantage de résistance à certaines malédictions ou encore ajouter des effets passifs à vos enchaînements. Certains de ces talismans seront même disponibles en trois versions, la dernière étant la plus puissante. La progression des caractéristiques est lente, à l’image de celle de l’aventure. A chaque fois que nous découvrons une carte, celle du monde se met à jour et dézoome légèrement. La carte finale est gigantesque. Très vite, nous comprenons qu’il est nécessaire de récupérer des runes majeures, au moins deux pour prétendre au trône d’Elden. Évidemment, il est bien plus intéressant de parcourir l’Entre-Terre pour mettre la main sur d’autres runes majeures, et rencontrer autant de demi-dieux aux combats épiques. Elden Ring a conservé l’aspect spectaculaire des affrontements de boss. Les principaux sont, pour l’immense majorité, introduits par une cinématique. Si le background d’Elden Ring est encore plus touffu que celui d’un Dark Souls, il est, en revanche, bien plus accessible. L’immense monde regorge de PNJ, de détails visuels et d’objets aux définitions explicites que les férus d’histoire seront ravis. Chaque boss et pnj a son rôle à jouer dans cette fresque.

La cendre d’invocation des trois loups est d’une grande aide en début de partie.

Encore une fois, From Software a réussi à créer un titre épique. Incarner un sans-éclat sans personnalité aide à s’identifier, mais l’accessibilité de l’histoire permet à tout un chacun de s’y plonger. En prenant toutefois des notes tant les détails sont importants. Le studio japonais a d’ailleurs fait un pas de géant dans l’accessibilité de son titre. Non, il n’y a pas de mode facile. Hidetaka Miyazaki a toujours refusé de le faire, souhaitant que son jeu reste équilibré selon les souhaits de l’équipe. Que le sentiment d’accomplissement et l’addiction à la réussite perdurent. Et il a raison. En revanche, il a ajouté des aides à même de faire chuter drastiquement la difficulté, de façon à ce que chacun ait, finalement, la même expérience. Ainsi, si les attributs, les armes et protections sont les mêmes pour tout le monde, libre à chacun d’utiliser, ou non, les cendres d’invocation. Ces esprits fantomatiques peuvent être convoqués à divers endroits, imposés, du jeu, notamment face aux boss, pour nous assister. Disposant d’une barre de vie, ces invocations peuvent non seulement vous prêter main-forte mais aussi attirer l’attention d’ennemis. Leur amélioration peut les transformer, pour certaines, en seconds joueurs en fin de partie. Elles ne feront toutefois pas, non plus, votre travail et il faudra tout de même lutter un minimum pour avancer. En complément, il est toujours possible de recevoir l’aide d’autres joueurs, véritables eux, si nous sommes connectés aux serveurs d’Elden Ring

Chaque mot des PNJ sert l’histoire.

Ajoutons à cette nouvelle faculté ce monde gigantesque, qu’il est possible de parcourir de la façon qui nous enchante. Si les donjons principaux, lieux à visiter impérativement, sont, par définition, obligatoires et indiqués par les sites de grâce, il est tout à fait possible de partir dans le sens opposé. Cela nous permet de, non seulement découvrir nombre de quêtes et de lieux, mais aussi des téléporteurs à même de nous emmener bien plus loin dans les terres d’Elden Ring. La difficulté peut alors subir un pic, mais qu’importe, il suffit souvent d’aller explorer d’autres lieux pour revenir, plus tard, plus fort et plus aguerri. A l’image des Souls, les statistiques sont importantes pour s’équiper, chaque set d’armure ou arme nécessitant des pré-requis, mais pas pour vaincre plus facilement. Il est indispensable d’améliorer ses armes auprès des forgerons pour espérer trucider correctement du chevalier ou du rat géant. From Software a aussi la possibilité de se téléporter d’un site de grâce à l’autre : il y en a partout. Ils ont même ajouté des statues à l’effigie de la reine Marika, servant de points de contrôle en cas de décès sur de longs parcours, justement sans site de grâce. Découvrir la rigueur des jeux From Software par Elden Ring rendra la découverte des Souls plus ardue, tant Elden Ring amène du confort partout, tout le temps. Mais grâce à ces mécaniques, le titre réussit à s’ouvrir de manière magistral aux joueurs et joueuses moins aguerri(e)s, tout en sacrifiant pas son intérêt.

Parcourir l’Entre-Terre se veut aussi agréable que subjuguant. La direction artistique du titre est à la hauteur de celle des Souls, à savoir somptueuse. En jouant avec les perspectives et avec l’architecture des lieux, From Software réussit, malgré la liberté laissée au joueur, à lui offrir des panoramas incroyables. Que ce soit en haut du château de Valorage, au sein de l’académie de magie, depuis les tours divines, le jeu réussit sans cesse à se renouveler. A pied, les édifices et la verticalité des lieux impressionnent. A cheval – sur Torrent, disponible très tôt dans le jeu – le point de vue évolue, tout en conservant cette ampleur. Les combats à cheval se révèlent plutôt bien pensés, et permettent d’effectuer de sacrés dégâts aux quelques boss présents sur la carte du monde. Encore faut-il apprendre à jongler entre les coups à droite et à gauche.

Les dragons occupent une part non négligeable de l’histoire d’Elden Ring.

En combat, Elden Ring reprend à l’identique le gameplay des Souls, deux bras, deux boutons, L1 et R1. Avec L2 et R2, il est possible de faire appel aux techniques liées aux armes ou leur cendre de guerre. Une nouveauté ici : il s’agit de cendres à équiper sur nos armes pour les enrichir de capacités. Combat à une main, deux mains, à une arme et un bouclier ou à deux armes. A nous de choisir. La concentration reste de rigueur pendant tout le jeu, le moindre ennemi pouvant nous occire en quelques coups. Certains n’ont rien à envier à certains boss. D’ailleurs, en fin de partie, nombreux sont ceux qui sont, en réalité, d’anciens boss. Pour esquiver, la roulade est toujours possible. Son timing continue d’évoluer pour devenir toujours un peu plus accessible. Il ne faut réellement pas la négliger, notamment face aux maîtres des lieux, elle est réellement l’élément indispensable à la survie. Se protéger derrière un bouclier entamant malheureusement très vite la jauge d’endurance. Pour rappel, tous les mouvements dans un Souls-like diminuent l’endurance. Cette dernière remonte avec le temps, mais il est donc nécessaire de bien jauger le nombre d’actions réalisables avant qu’elle n’arrive à zéro, nous laissant alors sans moyen d’attaquer, d’esquiver, de fuir ou de nous protéger. En revanche, nouveauté, courir sans ennemi aux alentours peut désormais se faire sans entamer cette jauge. Encore une fois : un vrai confort. L’immense nouveauté tient dans l’ajout d’une touche Saut. Bonjour attaques sautées dévastatrices. Si cette petite révolution peut radicalement changer certains affrontements, elle permet, surtout, au quotidien, de revoir complètement les perspectives d’exploration. La visite des toits de l’académie royale requiert, par exemple, de passer de bâtiment en bâtiment.

Dans Elden Ring, la taille ne compte pas.

Et au-delà de son histoire cryptique, de sa direction artistique qui crève l’écran, de son système de combat toujours aussi bien pensé, de sa maniabilité quasi-parfaite, la véritable puissance d’Elden Ring est de nous droguer. De par sa générosité sans pareille, il nous amène sans cesse à vouloir poursuivre notre aventure, pour explorer toujours plus de lieux, toujours plus de grottes, toujours plus de tours. La science du level design des Souls se retrouve dans les donjons principaux. Les optionnels, et les mini-donjons disséminés un peu partout, peuvent paraître un chouïa fades en comparaison. Pourtant, ils recèlent tous une myriade de trésors et de boss parfois originaux qu’ils nous poussent en permanence à en dénicher de nouveaux. La carte du monde se met alors à jour. Sans compter certains PNJ planqués, ou des quêtes d’autres nous amenant à explorer des mines à l’autre bout de la zone. Passages secrets, murs illusoires et même chemins invisibles sont également de sortie pour continuer de nous surprendre pendant la centaine d’heures nécessaire à l’accomplissement de notre destin. Ceci sans compter les six fins différentes, aux quêtes passionnantes. Pour peu que nous nous soyons préservés de tout spoiler, l’exploration d’Elden Ring provoque à de nombreuses reprises l’effet Waouh qui n’est pas si fréquent. Du début à la fin. Même les derniers kilomètres parcourus continuent de nous en mettre plein la vue, avec des visions fantastiques – les Xbox Series X et Playstation 5 ne bronchent que très rarement – et des parcours toujours plus malins. 

En 119 heures de jeu, et 1000G obtenus, il est bien difficile de trouver le moindre défaut à Elden Ring, sans lui pardonner aussitôt. La formule a conservé certaines de ses errances, telles que celles de la caméra dès lors que vous ciblez un ennemi imposant. Combattre certains dragons au corps à corps peut provoquer des sueurs froides, pour d’autres raisons que leur difficulté. La caméra a tendance à se perdre dans les pattes de l’animal, or la moindre erreur peut voir disparaître jusqu’aux deux-tiers de notre barre de vie. Nous notons aussi une gestion des impacts avec le décor assez particulière : les coups des adversaires ayant tendance à traverser les murs et nous toucher. Au sein d’une maisonnette de campagne, nous pardonnons, au sein d’un château aux murs bien épais, c’est plus difficile. Des éléments du décor peuvent aussi apparaître de manière étonnante, par instant. Parfois, de grossières textures nous apparaissent au détour d’un couloir sombre dans les profondeurs d’une ville. Mais qu’il est ardu de mettre le jeu à l’amende pour ce genre de détail. Elden Ring se révèle bien trop solide pour que son expérience de jeu ne soit entachée par ce genre de peccadilles.

Elden Ring a eu le droit à deux éditions collectors majeures à sa sortie, une collector, disponible partout et une collector premium exclusive à la boutique en ligne de Bandai Namco. Cette dernière contient le casque taille 1:1 de l’un des personnages du jeu, Malenia. Le collector contient, au-delà du jeu, en édition simple, un steelbook, un code de téléchargement pour la (fabuleuse) bande son signée, un artbook de 40 pages à conserver fermé jusqu’au générique de fin (il révèle tous les boss majeurs) et la statue du personnage de Malenia (en deux morceaux : la statue en elle-même et son arme à équiper). 199€ pour la collector, 259€ pour la premium. Le tarif est dans les deux cas un peu salé. Indépendemment de son prix, il faut reconnaître la qualité du contenu, notamment l’artbook et la statue, tous les deux de qualité. Même si les matériaux utilisés pour Malenia auraient pu être un peu plus nobles.

Elden Ring
Appréciation
Dans notre coeur de joueur, il y aura un avant et un après Elden Ring. Son monde ouvert fascinant subjugue tellement qu’il met à l’amende la plupart des jeux en proposant. From Software et Miyazaki ont encore réussi à améliorer la formule, tout en se privant du nom Dark Souls. Plus grand, plus beau, plus accessible. Ainsi pouvons-nous résumer Elden Ring. Le monde paraît si précis, les équipements si bien pensés, les boss si impressionnants (mais peut-être moins marquants que ceux des Souls), que nous ne pouvons que saluer le travail d’orfèvre des équipes japonaises. Sans compter qu’ils ont tenu à écouter les joueurs demandant toujours plus d’assistances, sans dénaturer l’expérience. C’est incroyablement malin, et surtout équilibré. L’une des fins laissent penser qu’une suite est possible bien que Miyazaki n’ait jamais caché ne pas être un grand fan des numéros deux. En tout cas, Elden Ring fait partie de ces jeux marquant d’une pierre blanche leur génération.
Points forts
Une direction artistique incroyable
Un univers fascinant
Un sentiment d’accomplissement permanent
L’envie irrépressible d’explorer
Une liberté très plaisante
L’accessibilité au coeur des nouveautés du jeu
Une durée de vie gigantesque
Points faibles
Une caméra aux fraises sur les gros adversaires