Kona

Enquête glaciale au pays des caribous

Genre
Aventure
Développeur
Parabole
Éditeur
Parabole
Année de sortie
2017

Les jeux d’aventure en trois dimensions ont décidément le vent en poupe depuis quelques années. Chaque développeur y va de sa propre vision du genre et s’attache bien souvent à y implémenter leurs idées ou les influences d’autres médias ou confrères vidéo vidéoludiques. Aujourd’hui nous allons nous intéresser, le temps tout de quelques caractères, à Kona, la première création, disons-le fort sympathique mais pas exempte de petits défauts, du studio québécois Parabole, sorti en 2017, sur les principaux supports du moment.

Se déroulant en 1970 au Canada, Kona nous met dans la peau de Carl Flaubert, un détective chargé par un riche entrepreneur anglais d’enquêter sur des menaces concernant sa personne. Travaillant habituellement à Montréal, le voilà parti, bien à contrecœur, pour les contrées les plus reculées du Québec dans la petite bourgade tout à fait pittoresque de Atamipek. Mais le job paye bien, autant s’y déplacer. Les choses s’emballent cependant rapidement quand il approche du patelin : manquant de peu de rentrer en collision avec une voiture arrivant à toute bringue en face de lui, il échoue son véhicule dans un fossé. Assommé par le choc, il se réveille indemne mais étrangement refroidi : maintenant là dehors, y fait frette bien comme il faut et une tempête de neige fait rage, alors que nous sommes en plein dans l’automne. Mais pas vraiment le temps de niaiser, notre enquêteur n’étant pas des mieux équipés pour affronter ce froid rigoureux.

Cette introduction est l’occasion opportune pour glisser un tutoriel du gameplay de Kona. Avant tout un jeu d’aventure à la première personne, il introduit également quelques aspects en rapport avec la survie, présentés sous trois éléments distincts déjà mis à mal avec l’accident et la nouvelle situation météo : la température corporelle, un simple blouson n’étant pas suffisant face au froid polaire, la santé physique vu le choc subit à la tête, et le stress pour tout ce qui se passe de peu commun depuis son arrivée. Dès lors, il s’agira rapidement de quoi se soigner, se réchauffer et se calmer un peu.

Une fois remis sur pied et sur route, les choses vont prendre encore une toute tournure, au point que Carl va devoir enquêter sur le devenu de la population du village aux habitations éloignées, celle-ci semblant à priori s’être totalement volatilisée. C’est sur cet aspect qu’intervient la partie aventure, Kona nous invitant à nous balader en voiture ou à pied, à travers les chemins en forêt, ou à fouiner dans les maisons abandonnées à la hâte par les villageois, à la recherche d’indices et autres informations,  avec pas mal de placards et tiroirs à ouvrir et de papiers à lire. Notre enquêteur, très consciencieux, notera absolument tout, et n’hésitera pas à prendre des photos pour illustrer ses écrits. Pour pimenter nos escapades, notamment en milieux plus éloignés, il faudra faire attention aux meutes de loups qui rodent aux alentours, les carnivores étant particulièrement affamés et prêts à prendre n’importe quels risques, quitte à prendre une balle entre les deux yeux. Gare d’ailleurs au stress qui monte grand V à leur approche, car la visée s’en verra fortement impactée.

On l’aura compris, notre enquête au départ assez simple va rapidement s’épaissir avec de nouveaux éléments ainsi qu’une part non négligeable de mystères qui, des dires des habitants, auraient une part de surnaturel. A moins que cela soit l’isolement qui travaille les esprits ? Toujours est-il que tout ce contexte s’avère fort dépaysant. Le déroulement, durant les années 70, au cœur du Québec, en pleine guerre froide sur fond d’insurrection contre la couronne britannique, aide beaucoup dans l’implication, surtout avec le narrateur qui accompagne nos péripéties, aux répliques cinglantes avec évidemment, un inimitable accent québécois. On s’y croirait. Il est à noter que visuellement, pour un jeu qui commence à dater quelque peu, Kona reste encore très agréable à regarder et surtout très immersif là encore, avec beaucoup d’attention aux détails, assez documentaire, comme cet amour de la province francophone pour, à l’époque, les disques de Joe Dassin. Dommage cependant que sur une bécane de 2020, on subisse encore des chargements lors de passages à certaines zones.

Pour revenir sur l’enquête, l’accumulation d’informations ne faisant pas tout, nous serons amenés à répondre, durant nos déplacements à travers le village, à différentes situations impliquant un brin de bricolage et saupoudré parfois d’un peu de jugeote via un ersatz de crafting avec utilisation de ressources trouvées ça et là. Pas de quoi révolutionner un genre tout entier, vu qu’il s’agira très souvent de réunir trois objets au maximum. Et pas de quoi non plus se creuser les méninges comme dans un pointé-cliqué en 2D ou un Myst, le jeu étant assez généreux en indices, notre héros prenant le soi, on le rappelle, d’absolument tout noter. Concernant la partie partie survie, c’est encore plus dommage qu’elle ne soit au final suffisamment mise en avant, le froid ne se voulant agressif qu’à des moments bien précis de l’aventure, pour des feux de camps qui n’ont jamais besoin d’être réalimentés, et les affrontements avec les loups résultant rarement, voir jamais, par une morsure, les canidés étant visiblement myopes. La mort de froid ou par hémorragie généralisée sera ainsi absente durant la majorité du jeu à la vue des ressources offertes et la faible difficulté proposée.

C’est d’autant plus ballot que Kona se prêtait pourtant à de bonnes séances de pétoche et de panique dues au climat général et à l’ambiance posée d’emblée en mode survivant. Sur ce point, on pourra tout de même saluer le sentiment de solitude assez exceptionnel, poussé par ces décors enneigés et ces bourrasques constantes qui accompagnent nos oreilles. Se balader, à pied où en voiture, à la simple lumière d’une torche ou des phares, dans ce village vidé de ses habitants, avec une simple carte pour ne pas se perdre, fait vraiment son petit effet. L’histoire et toutes ses révélations, globalement plutôt bien ficelée et dévoilée par nos découvertes et l’excellent narrateur, et ce malgré une dernière partie au déroulé un peu trop expéditif, font que l’on se plonge vraiment, et avec intérêt, dans cette glaciale contrée.

Kona
Appréciation
Mais tout de même, pour pour son premier essai, le studio Parabole marque beaucoup de points. Une histoire assez classique mais bien écriture, pour une enquête prenant place loin dans le temps et dans une contrée rarement parcourue dans un jeu-vidéo. On regrettera une partie survie en dent de scie côté immersion, pour une implication et des retombées sur le gameplay assez négligeables. Cependant, cette immersion qui sera cependant et terriblement contrebalancée par une ambiance glaciale au possible. Kona est en somme très sympathique et vaut mine de rien le coup d'oeil, et on surveillera avec très grand intérêt les prochaines réalisations du studio.
Points forts
Ambiance glaciale et immersive
Intrigue bien écrite
Réalisation tout à fait réussie
Points faibles
Une partie survie en dessous
Quelques chargements invasifs