Utopiales 2021 : séances spéciales, documentaires, rétrospectives

Au programme : Wonderland : Le Royaume Sans Pluie, Poupelle of Chimney Town, After Blue (Paradis sale), Spaceship Earth, Satoshi Kon : L’Illusionniste, Une fois que tu sais et Metropolis

En dehors de la compétition, les Utopiales permettent de découvrir de nombreux films à part, rétrospectives et documentaires, avec des projections parfois inédites et des curiosités que les organisateurs espèrent faire découvrir aux festivaliers. Cette année au programme pour nous (et vous qui nous lisez), en plus d’une unique rétrospective (pour une fois) : deux animes, du documentaire en voulez-vous en voilà, et un… bien curieux truc.


Les séances spéciales

Genre
Aventure
Réalisation
Keiichi Hara
Année de production
2019
Pays
Japon

Wonderland : Le Royaume Sans Pluie

Akané est une jeune fille rêveuse. La veille de son anniversaire, elle se rend chez sa tante antiquaire pour récupérer son cadeau. Dans l’étrange bric-à-brac de la boutique, elle pose sa main sur une pierre magique. S’ouvre soudain un passage secret d’où surgit Hippocrate, un alchimiste venu d’un autre monde. Il veut convaincre Akané qu’elle est la Déesse du vent vert dont parle la légende et qu’elle seule peut éviter la terrible sécheresse qui menace son royaume…

Avis de Vidok

Le créateur d’Un été avec Coo nous propose son “Royaume des Chats”. Par bien des aspects Wonderland Le Royaume sans pluie rappelle les productions Ghibli. D’entrée de projection, les superbes couleurs nous transportent. Que ce soit au Japon ou dans le monde parallèle, les panoramas sont souvent superbes. Les paysages explosent dans la seconde moitié de l’histoire, nous laissant admiratifs plus d’une fois. Très vite, le message écologique nous est clair et simple d’accès, les enfants n’auront aucun mal à l’entendre. Même au niveau du rythme, le film s’en sort honorablement avec de multiples péripéties, le tout saupoudré d’humour, encore une fois, tout public. En revanche, il pêche complètement sur son casting. Akane, l’héroïne est transparente et ne sert pour ainsi dire à rien, jusqu’au dénouement. Hippocrate, le prodigieux alchimiste, amuse mais déçoit en seconde partie. Seule Chii réussit à redresser la barque, sans pour autant réussir à s’imposer à l’écran. Ne parlons même pas du duo d’adversaires, qui, eux aussi, en seconde partie, s’écroulent sous un scénario qui a bien du mal à se terminer. Wonderland Le Royaume sans pluie manque de profondeur et de consistance pour réellement faire honneur à sa splendide réalisation.

Avis de Mizakido

Il y a décidément un goût de trop peu avec ce Wonderland : Le Royaume Sans Pluie. Le prémisse d’une aventure grandiose dans un monde féerique présentait pourtant bien au départ, mais le soufflet retombe rapidement au bout des dix premières minutes de balade dans celui-ci. La réalisation de ce récent anime n’est pas en cause, même si elle ne casse franchement pas de grosses briques, mais ça reste plutôt joli. Le récit… Pas dingue non plus : l’héroïne, logiquement pas motivée au commencement, ne fait pas grand-chose pendant la moitié du film, et sur la partie finale… Pas de souvenir d’un truc marquant, alors qu’elle est tout le temps annoncée comme la « déesse du vent vert ». Des pouvoirs ? Non, pas vraiment. Tout le boulot est (heureusement !) assuré par les personnages secondaires, plutôt classiques au demeurant d’ailleurs. L’univers, qui donnait l’impression d’avoir du potentiel, ne marque pas spécialement, vu qu’il est parcouru à vitesse grand V, alors que paradoxalement, le rythme, comme le scénario, ne décollent pas, et s’autorisent en plus des coupes pour accélérer certains passages. Le méchant et ses ambitions machiavéliques ? Assez oubliable. La morale ? Mouais. Bref, si on passe un moment sympathique, vu qu’il y a tout de même quelques moments rigolos, mais le cœur n’y est pas, surtout quand en face il y a Belle ou encore Poupelle of Chimney Town projetés en parallèle durant le festival.


Genre
Aventure
Réalisation
Yusuke Hirota
Année de production
2021
Pays
Japon

Poupelle of Chimney Town

Lubicchi vit seul avec sa mère dans une ville dont le paysage est parsemé de cheminées, à tel point que la fumée qui s’en émane cache constamment le ciel pour ceux qui y vivent. Il occupe un travail quotidien de ramoneur, ce qui lui permet de se rapprocher un peu plus du ciel. Son rêve serait de libérer le ciel de cette fumée constante et faire découvrir les étoiles ainsi que le monde environnant aux habitants de Chimney Town. Son destin va changer le jour où il fait la rencontre d’un être formé de déchets…

Avis de Vidok

Nous suivons Lubicci, dans Chimney Town, la ville dont la fumée des cheminées obscurcit totalement le ciel. Lubicci rêve d’observer un jour les étoiles, dont son père lui a tant parlé. Porté disparu depuis des années, il est considéré par tous comme un fou. Sa mère, malade, ne pouvant travailler, Lubicci prend un travail de ramoneur. Ce dernier lui permet de subvenir aux besoins de lui et sa mère, tout en se rapprochant du ciel. Son chemin va croiser Poupelle, une être fait de déchets, qui deviendra très vite son ami. Lubicci, lui d’habitude si solitaire, s’ouvre alors à Poupelle, afin de mener, non seulement à bien son rêve mais pour réhabiliter la parole de son père… Adapté d’un livre pour enfant, Poupelle, malgré le contexte assez sombre, est destiné à un jeune public. Le dessin, rappelant fortement, justement, le trait d’un livre attire l’œil. L’animation parfaite finit de nous convaincre, s’il le fallait encore, du talent de Studio 4°C (Harmony, Mutafukaz). Sans crier gare, Poupelle, aborde de nombreux thèmes comme celui des rêves et le regard des autres, et par extension la pression sociale. Sans oublier l’influence des ordres religieux sur la vie sociétale. Pas certain que les enfants y voient autant de choses, mais Poupelle recèle de lectures, planquées sous les gags ou les personnages hauts en couleur (sacré Scoop). Véritable conte pour enfants, Poupelle amène son final, attendu mais satisfaisant, accompagné par une bande son irréprochable. Au-delà du bon moment que les enfants passeront très certainement face à Poupelle, il sera difficile pour les parents de ne pas y avoir une ode à la passion, l’héritage et l’importance de l’éducation. L’éducation du rêve. Oui, Poupelle a su toucher quelques cordes sensibles chez moi qui m’ont hérissé les poils et passionné du début à la fin. Cela reste un conte enfantin avec une mise en avant des plus jeunes et des faits peu vraisemblables (en même temps, un homme déchet, what else ?), mais quelle aventure et message !

Avis de Mizakido

Très belle surprise que ce Poupelle of the Chimney Town (avec un P), qui est une réussite sur tous les plans. Avec sa direction artistique et son univers steampunk enchanteur (dont on m’a fait remarquer le petit côté Professeur Layton), il propose une réalisation tout en 3D du plus bel effet, très très loin du rendu saccadé que l’on a pu voir sur d’autres films utilisant le même procédé (genre The Relative Worlds). On commençait à reconnaitre une certaine expertise sur le sujet de la part de Studio 4°C, mais ici, c’est confirmé : c’est joli, fluide au possible. Et en plus cette fois, leur savoir-faire est au service d’une direction artistique visuellement éclatante de couleurs, ainsi que d’une histoire travaillée, facile à suivre, riche en rebondissements qui accompagne une galerie de personnages attachants et souvent très drôles, avec des caractères classiques de l’animation japonaise en mode « simple mais efficace ». Émouvant et fourmillant d’idées, le scénario propose des situations avec un mélange bien proportionné de séquences rythmées par une excellente mise en scène – parfaitement lisible en plus – et de moments plus portés « émotion », pas guimauve du tout, avec parfois de sympathiques chansons, elles aussi bien écrites et pleines de bonnes ondes, en fond sonore. Petit coup de cœur, en tout cas, ici.


Genre
« Western »
(à priori)
Réalisation
Bertrand Mandico
Année de production
2021
Pays
France

After Blue (Paradis sale)

Sur After Blue, ne survivent que les femmes. Roxy, une adolescente, délivre une criminelle prisonnière des sables, qui abat froidement plusieurs personnes. Bannies, Roxy et sa mère sont condamnées à retrouver la coupable et à l’éliminer.

Avis de Vidok

Ma culture cinématographique n’est pas la plus étendue. Mon œil n’est probablement pas le plus affuté en matière d’œuvres artistiques. Et je ne connaissais pas Bertrand Mandico, le réalisateur. Par contre, je peux vous assurer qu’After Life représente très certainement l’un des pires moments vécus dans une salle obscure. Dialogues lunaires, jeu d’acteur inexistant, décors immondes, mise en scène lamentable, bande son horrible, évidemment – il n’y a pas d’autre explication – que c’est voulu. Paraît-il que Paradis Sale est une oeuvre poétique. J’ai dans l’idée que la poésie amène de l’harmonie. Rien ne va ici. Même si deux-trois répliques peuvent nous faire rire – de honte et de dépit – le reste n’est qu’un amoncellement d’horreurs. Peut-être que je suis passé à côté d’une oeuvre majeure. Mizakido en parle bien mieux que moi, tolérant comme il est. Je me suis senti sale en sortant de la séance, et avec la certitude d’avoir perdu deux heures de ma vie.

Avis de Mizakido

Séance (très très) spéciale du festival annoncée comme un « le trip poétique à son apogée », After Blue se présente davantage comme une espèce de western fantastique au casting entièrement féminin qui baigne dans une ambiance oscillant entre les années 80, de la série Z bien cheap et… Flash Gordon, ce qui revient un peu près à la même chose. Dès les premières minutes, on sent que l’on va devoir s’accrocher pour survivre à cette quête de vengeance totalement perchée : un logo tout en néon, un filtre VHS omniprésent, du synthé en fond musical, des décors grotesques, des allusions sexuelles tout le temps et à peine subtiles, ainsi qu’une certaine fixette sur les poils et les marques de luxe, allez savoir pourquoi. Au fur et à mesure s’installe l’incompréhension doublée d’une étrange fascination devant ce cocktail visuel et sonore totalement aléatoire, d’une lenteur lancinante, avec des dialogues sans queue ni tête et surtout un jeu d’actrices disons… Outrageusement discutable ? Puis vient le moment « magique », lors d’une conversation aérienne d’au moins cinq bonnes minutes entre deux protagonistes, à priori lâchées en roue-libre par le réalisateur vu qu’on a absolument pas retenu le sujet, et qui a par ailleurs trouvé intéressant de garder un rot au montage (oui oui oui oui), où, devant l’absurdité du texte, un fou rire général a gagné le valeureux public du festival qui n’avait pas encore fui de cette projection pleine de questionnements. Difficile donc, en fin de séance, devant ce générique mal cadré, sans vraiment connaître le travail de Bertrand Mandico, le maître penseur derrière la caméra, déjà bien connu du monde cinématographique français, familier de l’Étrange Festival (AH ?!), et qui a déjà une dizaine de films à son actif, et c’est la dernière virgule, de savoir à quel degré prendre ce… « (Paradis sale) ». Mais plus j’y réfléchis, plus je me dis personnellement que tout cela était parfaitement volontaire… Ce n’est pas possible autrement. Le programme a dû induire pas mal de monde en erreur. Ou alors, j’ai vraiment loupé un wagon. Grmf.


Les documentaires

Réalisation
Matt Wolf
année de production
2020
Pays
États-Unis

Spaceship Earth

En 1991, huit rêveurs visionnaires ont passé deux ans en quarantaine à l’intérieur d’une réplique – conçue par eux-mêmes – de l’écosystème terrien appelée Biosphère 2 en prévision d’un possible désastre écologique menaçant la vie humaine. Ce documentaire captivant retrace la façon dont les participants au projet Biosphère 2 vivaient, cultivaient de la nourriture et étaient en désaccord avec des biodômes géants. C’est l’histoire du chef de commune excentrique mais charismatique John P. Allen, qui dirigeait un ranch collectif au Nouveau-Mexique, où, dans les années 70, il rencontra le jeune milliardaire rebelle Ed Bass. Ce dernier lui proposa de mettre une partie de l’argent de sa famille à sa disposition pour réaliser l’une de ses visions les plus chères : construire un gigantesque écosystème clos de style biodôme.

Avis de Vidok

En 1991, huit scientifiques se sont enfermés dans une biosphère pendant deux ans. L’objectif était de créer un écosystème autonome au sein d’un environnement clos. Comme serait une colonie sur Mars, par exemple. Cette incroyable expérience scientifique s’est révélée être un triste fiasco. Fort de son heure et demie, Spaceship Earth nous présente le projet et notamment ses prémices. Presque la moitié du documentaire nous raconte l’histoire des créateurs de la biosphère. Comment en sont-ils arrivés là ? D’autant qu’ils n’étaient absolument pas scientifiques. Et ne l’ont pas été davantage lors de l’expérience. C’est d’ailleurs le premier grief à faire au documentaire : il s’appuie peut-être un peu trop longuement sur l’avant-projet. C’est intéressant mais l’ensemble ne faisant que 1h30, le plus passionnant reste l’expérience en elle-même. Et ses conséquences. Justement, les conséquences sont très rapidement expédiées. Deuxième grief, et très certainement conséquence du premier. Le documentaire nous présente souvent les situations, les soucis politiques, la vision des médias mais s’arrête finalement assez peu sur les données scientifiques. Il se veut abordable et grand public, malheureusement au détriment de sa substance scientifique. Certes, il y a des événements qui peuvent l’expliquer, mais il y a tout de même eu, si l’on en croit le maître Internet, quelques résultats. Spaceship Earth perd du temps en démarrant lentement et une fois lancé, s’arrête trop brusquement. Globalement intéressant mais frustrant.


Réalisation
Pascal-Alex Vincent
Année de production
2021
Pays
France

Satoshi Kon : L’Illusionniste

Le mangaka et cinéaste d’animation Satoshi Kon est mort brutalement en 2010, à l’âge de 46 ans. Il laisse une œuvre courte et inachevée, qui est pourtant parmi les plus diffusées et les plus influentes de l’histoire de la culture japonaise contemporaine. Dix ans après sa disparition, ses proches et ses collaborateurs s’expriment enfin sur son travail, tandis que ses héritiers, au Japon, en France et à Hollywood, reviennent sur son legs artistique. Satoshi Kon, l’illusionniste évoque la trajectoire d’un auteur solitaire, dont la vie fut dédiée à la bande dessinée et à l’animation pour adultes.

Avis de Vidok

Mon adolescence a été marquée par deux films majeurs, Perfect Blue et Jin-Roh. J’étais probablement un peu jeune pour comprendre toutes leurs subtilités, mais j’étais subjugué par leur réalisme. Puis viennent Tokyo Godfathers, Paprika et Millenium Actress. Dans cet ordre-là chez moi. Tous ont été marquants. Autant dire qu’en tant que spectateur, je ne peux qu’applaudir le génie de Satoshi Kon. Ce documentaire, commandé par la famille Kon, permet de revenir sur la genèse de ces quatre films. Tout en questionnant les plus ou moins proches collaborateurs du réalisateur, de Mamoru Oshii (les films Patlabor, The Sky Crawlers) à Mamoru Hosoda (Belle) en passant par Darren Aronofsky (Requiem for a dream, Black Swan) ou Rodney Rothman (Spider-Man New Generation). De l’aveu du réalisateur : il a été difficile de trouver des témoignages sympathiques à l’égard de Satoshi Kon. L’homme semblait bien difficile à supporter. Désireux de mettre l’accent sur son travail, sans pour autant occulter son caractère, Pascal-Alex Vincent réussit à dépeindre en environ 1h20 un portrait assez large du personnage. Comme une initiation à l’univers Satoshi Kon. Évidemment, nous aurions aimé en apprendre encore davantage. Des dizaines d’heures d’interviews existent. Peut-être qu’une suite paraîtra un jour… Ou espérons que d’autres réalisateurs et producteurs s’attacheront à poursuivre le tableau.

Avis de Mizakido

Parcourant la – malheureusement trop courte – filmographie de feu Satoshi Kon, ce documentaire est un résumé plutôt complet de la carrière du réalisateur japonais, à qui l’on doit Perfect Blue ou encore Paprika. Et Millennium Actress. Et Paranoia Agent. Et Tokyo Godfathers. Appuyé par de nombreuses interviews avec notamment messieurs Mamoru Hosoda (Les Enfants loups, Belle, …) et Oshii (Innocence : Ghost in the Shell 2, Avalon, …) ainsi que beaucoup d’extraits, anecdotes et analyses de ses films, il constitue une bonne entrée en matière pour toute personne souhaitant découvrir, tout découvrant par hasard, l’univers plutôt singulier du réalisateur aux idées incroyables, et pour les autres, d’en apprendre un peu plus sur l’homme et son caractère à priori pas toujours simple à appréhender. Aux dires du réalisateur du documentaire, qui n’a pas réussi à tirer les vers du nez de Katsuhiro Otomo (Akira, Steamboy, …), il aurait été tout à fait possible d’en faire un film de plusieurs heures, mais la réalité du format en aura décidé autrement. Peut-être pour une version augmentée ?


Réalisation
Emmanuel Cappellin
Année de production
2020
Pays
France

Une fois que tu sais

Confronté à la réalité du changement climatique et à l’épuisement des ressources, le réalisateur Emmanuel Cappellin prend conscience qu’un effondrement de notre civilisation industrielle est inévitable. Mais comment continuer à vivre avec l’idée que l’aventure humaine puisse échouer ? En quête de réponses, il part à la rencontre d’experts et de scientifiques tels que Pablo Servigne, Jean-Marc Jancovici ou Susanne Moser. Tous appellent à une action collective et solidaire pour préparer une transition la plus humaine possible.

Avis de Vidok

Étonnante projection qu’Une fois que tu sais. Le réalisateur, Emmanuel Cappellin, était présent, et l’est autant que possible à chacune d’entre elles. Le documentaire suit les pérégrinations de son propre réalisateur, sur plusieurs mois (années ?). Nous l’accompagnons dans ses rencontres et réflexions sur l’avenir de la Planète. L’intérêt du documentaire est de s’appuyer sur les avis éclairés de spécialistes du sujet. Il n’en oublie pas l’émotion, notamment lorsqu’il filme une conférence de Pablo Sevigne durant laquelle ce dernier rappelle que même si l’humanité agit, elle n’est pas certaine de l’emporter. C’est finalement difficile à accepter. Le film insiste sur l’importance du sujet, l’état catastrophique dans lequel se trouve la planète. Il oublie de culpabiliser ses spectateurs : son objectif est de le sensibiliser pour mieux l’inciter à bouger. Il ne contient aucune méthode, il ne donne pas de conseils : il présente un constat, de façon mi-scientifique, mi-émotionnel, probablement dans le but de toucher un maximum de personnes. 

D’ailleurs, au sortir, l’équipe du film, et de son association, propose un temps d’échange. Que ce soit au travers de jeux ou de questions/réponses, l’équipe accompagne son public, au sortir de la projection, pour aller un peu plus loin. Le long-métrage étant plus qu’anxiogène, ce temps d’échange permet de retrouver un peu d’espoir. Très intéressant.

Avis de Mizakido

Avec son thème « Transformations » et le fait (notable) qu’une certaine pandémie est toujours dans le coin, on sentait que globalement le ton de cette édition des Utopiales n’était pas nécessairement à l’optimisme. La conférence d’ouverture, toujours assurée avec brio par Roland Lehoucq, mettait déjà dans le bain et comportait pas mal d’alertes quant à notre futur. Alarmiste au possible mais avec une justesse certaine dans son traitement, Une fois que tu sais nous rappelle – une fois encore – qu’au train où nous allons, nous fonçons doucement, mais sûrement, vers un mur. Le réalisateur s’est entouré pour ce film de pas mal d’experts et d’acteurs scientifiques ou sociologiques pertinents, et expose tout simplement les faits, sans culpabiliser personne, de la crise climatique en cours et à venir, avec comme espérance optimiste que les gens changent un tant soit peu de paradigme quant à leurs habitudes et leur empreinte carbone. Malheureusement, vu l’issue de la COP26, ce n’est pas encore gagné…


Les rétrospectives La rétrospective

Genre
Drame
Réalisation
Fritz Lang
Année de production
1927
Pays
Allemagne

Metropolis

Au XXIe siècle, une métropole à l’architecture fantastique vit sous le joug d’un groupe de tyrans. Les aristocrates se prélassent dans de somptueuses demeures, tandis que la grande masse de la population survit durement dans les profondeurs de la terre. Le fils du maître de la ville découvre avec effarement l’existence du monde souterrain, où se rencontrent en secret les ouvriers, peu enclins à supporter pour toujours leur situation…

Avis de Mizakido

L’aubaine de profiter d’un grand écran et d’une assise plutôt confortable était trop forte, surtout quand on parle d’une œuvre majeure du cinéma de science-fiction. Et pour un film qui va bientôt fêter ses 95 (!) bougies, Metropolis n’a décidément pas perdu de sa superbe, que cela soit sur le fond ou sur la forme. Projeté dans sa dernière restauration, l’œuvre de Fritz Lang marque en effet toujours les esprits, avec une réalisation décidément, et on le répétera jamais assez, très avant-gardiste, avec ses décors monumentaux, ses plans léchés, ses trouvailles et astuces visuelles, et sa magnifique photographie mêlant l’expressionniste du cinéma allemand et de nouvelles techniques, mine de rien assez proches de celles des réalisateurs de notre présent siècle. Colossal dans sa (nouvelle) durée qui table pas loin des deux heures et trente minutes, découpé en trois énormes actes (le prélude dure une heure !), Metropolis est encore un film passionnant, avec des acteurs possédés, une mise en scène de soutenue, et de nombreux moments où le lyrisme se mêle à la folie. Nul besoin de voix : la musique, magnifique, orchestrale, aidé par des encarts de texte et l’expressivité des personnages, suffit largement. Les thématiques sont aujourd’hui devenues des sujets classiques du cinéma engagé : la lutte des classes, le totalitarisme, l’asservissement et la déshumanisation des hommes, avec des travailleurs réduits à l’état littéral de robots. Le traitement, lui, marque encore. La prouesse tient aussi dans sa restauration, avec des morceaux (très abîmés) issus sur une vieille pellicule retrouvée au Brésil, qui permettent, avec un nouveau montage, de se rapprocher davantage du récit initial imaginé par le réalisateur. Rien à voir (ou presque), mais vivement les premières projections, prévues en 2023, du légendaire Napoléon d’Abel Gance, réalisé lui aussi en 1927, et restauré en 2021 par la Cinémathèque française avec le soutien de Netflix. Au menu ? Sept (épiques) heures. Metropolis donc ? Un classique, qui a influencé et qui continue d’influencer. À voir, et à revoir, tout simplement. A noter d’ailleurs que le film est, à l’heure de publication de cette article, disponible sur… Netflix.