Memoria

Daedalic, développeur allemand de son état, enchaîne les point’n click de manière presque indécente. Un an après Les Chaines de Satinav, premier épisode issu des romans L’œil Noir, le studio propose une seconde aventure, véritable suite directe reprenant exactement après l’épilogue précédent.

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Autant dire que les allergiques au spoiler sont fortement invités à passer au paragraphe suivant, car les débuts de Memoria nous dévoilent le pauvre état de Nuri, transformée en corbeau et perdant peu à peu la mémoire. N’écoutant que son cœur, Geron décide de trouver un moyen de lui rendre son apparence et tout son esprit. Arpentant les régions, il tombe finalement sur un magicien qui accepte de l’aider à condition que Geron résolve une énigme. Cette dernière est contenue sur l’arche d’un tombeau. Pour la découvrir et s’y rendre, le magicien partage son rêve avec notre héros (de pacotille) : ce tombeau est profané par une troupe de personnages hauts en couleur, dont une jeune princesse, Sadja. Très vite ses pérégrinations vont se révéler bien plus importantes que prévues, amenant le joueur à alterner entre le présent de Géron et le passé de Sadja (400 ans auparavant) et à chercher le lien entre les deux aventures. Ces changements, extrêmement fluides, permettent un dépaysement total, les décors pittoresques visités par Geron laissant la place au monde fantastique de Sadja.

memoria-pc-006 La mode étant de proposer deux héros, de sexe opposé, à jouer en alternance, Memoria remplit son contrat. Huit chapitres, une dizaine d’heures de jeu pour achever l’aventure, beaucoup de tableaux à visiter, une narration lente à s’enclencher mais savoureuse sur la seconde moitié de parcours. Le bébé de Daedalic a tout du point’n click modèle. Un véritable cas d’école sur le papier. En pratique, c’est même mieux que cela. Les énigmes se veulent la plupart du temps à la portée de tout le monde, malgré quelques-unes plutôt retors voire illogiques, nous faisant encore nous demander ce qu’avaient bu les développeurs pour pondre cela, même une fois passée. D’une pression sur la touche Espace, les plus novices, ou les plus impatients pourront scruter tous les éléments dignes d’intérêt du tableau. Une manière désormais très répandue pour aider le joueur. L’inventaire, plutôt réduit et présent en bas de l’écran contribue à qualifier l’interface de simple et claire. Les deux protagonistes développeront au cours de l’histoire des pouvoirs, étroitement liés à la magie, amenant une rafraichissante diversité dans la résolution des puzzles. Certains d’entre eux peuvent, par exemple, influencer des PNJ, geler des plantes ou encore transformer des êtres en pierre. Plutôt intelligents et bien intégrés à l’histoire, ils permettent de se triturer encore un peu plus le cerveau devant ces somptueux décors faits main.

memoria-pc-008Chaque tableau se révèle être une peinture numérisée, au point de sentir le coup de pinceaux des dessinateurs. Memoria fait partie de ses BD interactives que l’on dévore des yeux une fois l’histoire débutée. Que ce soit les temples du début, les forêts labyrinthiques du milieu ou les forteresses de la fin, chaque pan recèle une multitude de détails, attirant l’œil, au point d’inspirer les créateurs à illuminer les éléments importants – sur une simple pression de la touche Espace – afin de s’y retrouver – en plus de permettre aux novices ou aux plus impatients de trouver et noter les éléments importants. Léger bémol en revanche sur les personnages, peu aguicheurs et surtout extrêmement rigides. Un travail a beau avoir été fait depuis le premier épisode, nous sommes encore loin d’un aspect naturel. La même irrégularité est notable dans le doublage. Ceci est d’autant plus dommage que non imputable aux développeurs : la plupart des doubleurs, anglophones ou germanophones rappelons-le, oublient la plupart du temps toute implication, nous servant alors des dialogues d’une mollesse consternante. La voix de Geron en premier, un comble. Ce n’est pas faute de proposer une écriture tout à fait excellente et souvent drôle. Il faut toutefois comprendre soit l’anglais soit l’allemand pour pouvoir profiter pleinement des déboires du bâton de Sadja, pas de sous-titres FR malheureusement.

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Au final, peu de choses à dire sur Memoria, très classique dans son déroulement mais bon d’un bout à l’autre. Daedalic maîtrise son genre et le fait savoir, en plus de disposer de brillants artistes, c’est une évidence. Il est impératif de se lancer dans Les Chaînes de Satinav pour ne pas devoir se farcir des résumés forcément emplis de spoilers sur le net avant d’attaquer Memoria. Son prix correct sur Steam devrait un argument supplémentaire aux yeux des amoureux du genre pour craquer et s’embarquer dans une histoire invraisemblable, menant à une conclusion tout aussi étonnante et passionnante.