Par delà que VA-11 Hall-A ait été un jeu coup de cœur, ça a été également une soundtrack qui m’a tout de suite séduite. Mieux, elle fait partie intégrante de la direction artistique du soft : l’union entre l’esthétique et interface aussi retro-pixel que chiadée de détails dans le chara-design et la bande-son dégage quelque chose qui matche instantanément. Permettant ainsi de se plonger et s’immerger dans l’histoire sans aucune difficulté, malgré le fait qu’on doive se coltiner une bonne quinzaine d’heures de lecture en anglais et de s’immerger véritablement dans les quatre murs de ce bar qu’on ne quittera pour ainsi dire jamais. Malgré tout, la musique est d’une qualité telle qu’il est parfaitement possible de l’écouter avec grand plaisir indépendamment du jeu – Mizakido, si tu lis ces lignes, je pense qu’elle devrait t’enjailler les esgourdes – et ce, même si on ne l’a pas parcouru. A noter que cet article ne se focalise que sur l’OST VA-11 Hall-A : Second Round, la plus riche et complète. Celle que l’on entend réellement dans le jeu. Parce que parallèlement, il existe aussi deux autres albums, à savoir VA-11 Hall-A OST Prologue : Sounds Of The Future qui représente la bande-son de la démo alpha introductive de l’univers du jeu présente sur itch.io, avec ses titres propres que l’on peut d’ailleurs retrouver sur le jeu final également et VA-11 Hall-A EX : Bonus Tracks Collection, réunissant principalement des remixes et réarrangements.
C’est d’ailleurs étonnant de constater qu’il s’agisse de la toute première OST en tant que telle de son géniteur, Michael Kelly, alias Garoad, tant le bougre montre énormément de maîtrise en terme de composition, véhiculant énormément d’ambiances différentes et de variétés de rythmiques et sonorités. Un côté touche-à-tout qui ne nuit nullement à la cohérence globale tant chaque piste nous paraît justifiée d’être intégrée au jeu sans jamais nous paraître incongrue. Peut-être parce qu’elle a été imaginé pour coller à tel ou tel élément, événement ou personnage de l’univers de VA-11 Hall-A comme le montrent ouvertement certains intitulés. « March Of The White Knights » faisant référence à la milice de sécurité où travaille Sei, le côté martial soulignant même qu’au-delà de la thématique militaire, il peut y avoir comme l’idée de l’arrivée de ces forces de l’ordre sur les lieux de manifestation contre une banque qui finira par se transformer en véritable guerre civile. « Those Who Dwell In Shadows », dégageant une ambiance qui n’aurait pas fait tâche dans un jeu d’infiltration avec quelques consonances plutôt menaçantes sans qu’elles ne soient pour autant noires et plombantes, est en réalité le thème du tueur à gages Jamie, un fervent habitué du bar. « Snowfall » nous dépeint l’ambiance des premières neiges sur la ville, étant donné que le jeu se passe en période de festivités de fin d’année. « Will You Remember Me ? » est ce thème où notre barmaid d’héroïne est confrontée à la petite sœur de son ex qu’elle n’a pas revu depuis des années et n’a pas tout de suite reconnue, son côté céleste et mélancolique montrant toute l’animosité de la déception et prépare à la tragique révélation qui justifie la venue de la jeune fille. Tandis que « Umemoto » peut faire référence à un thème urbain, l’intitulé faisant habilement dans la double référence (l’architecte et sculpteur sur béton canadien David Umemoto et le regretté compositeur japonais de synthwave Ryu Umemoto). Des exemples parmi d’autres donc.
Pourtant, pour la plupart, il y a fort à parier que vous ne les entendrez pas forcément aux moments opportuns. C’est l’une des caractéristiques de VA-11 Hall-A que l’on programme au début de chaque session de travail le jukebox du bar. Un détail qui semble anodin mais qui ajoute en immersion, d’autant plus que certains clients font parfois référence à l’ambiance sonore (ce râleur d’Ingram notamment qui souligne « qu’au moins la musique est bonne dans cet endroit mal famé par exemple »), comme si notre héroïne – et par conséquent nous-même – avait réellement sa carte à jouer sur l’ambiance qui peut bien se dégager de l’établissement, à l’image de la vraie vie donc. Autant dire, la plupart des musiques étant compilé sur le jukebox, chacune arrivera selon notre bon vouloir, de manière complètement hasardeuse, ce qui fait que tomber sur le morceau adéquat au bon moment est peu probable. Ce qui n’empêche pas pour autant certains thèmes d’être imposés en cours de jeu. Des thèmes autres que celui de l’écran d’accueil ou de l’appartement où l’on habite qui sert d’introduction à chaque journée de travail bien entendu. On pourra citer notamment « Go ! Go ! Streaming-Chan ! », sur-enjoué et intentionnellement agaçant, qui accompagne les quelques visites au bar de la streameuse Streaming-Chan de manière imposée, histoire de bien enfoncer le clou qu’il s’agit bien de quelqu’un (un peu trop) haut en couleur qu’on n’apprécie pas trop de voir dans les parages. Parce que son caractère est exaspérant d’une part et que le fait qu’elle filme sa vie quotidienne continuellement devant des milliers de voyeurs – parce qu’à ce niveau, on ne peut plus parler de simples viewers/spectateurs – rivés sur leur écran d’ordinateur ou de smartphone est d’autre part profondément gênant et malsain.
D’obédience synthétique – synthwave oblige – cela n’empêche pas d’entendre parfois un côté plus organique avec des parties de guitare. Comme sur la dernière partie de « A Neon Glow Lights The Way ». Deuxième titre de l’OST qui montre également une autre force de VA-11 Hall-A : celui de se sentir comme chez soi. Il règne dans ce titre quelque chose de rassurant et chaleureux, que ce soit dans ses trois quart d’entame purement lentes et atmosphériques qu’à l’emballement relatif de machine final, la transition tel une fleur qui s’ouvre. Des sonorités bienveillantes posant une ambiance relax et cozy, voire carrément apaisante comme pour nous inciter à passer un bon moment en dehors de toute contrariété, que l’on retrouve également sur des titres tels « Safe Haven », « The Answer Lies Within », « Everything Will Be Okay », « Nighttime Maneuvers » ou encore le récurrent thème du bar « Welcome To VA-11 Hall-A ». Quand bien même, certains passages paraissent plus graves et presque négatifs, on est très loin d’être dans des palettes totalement sombres (« Those Who Dwell In Shadows », « March Of The White Knights »). On peut également entendre des choses plus rythmées et dynamiques comme « Drive Me Wild », « All Systems, Go ! », tous deux synthwave 80’s en diable, tandis que d’autres paraîtront plus retro-technoïdes tels « Neo Avatar », « Through The Storm, We Will Find A Way », « Good For Health, Bad For Education », si ce n’est carrément techno house qui sait partir en pseudo-boom boom dansant et trippant sur « Synthestich ».
Cette soundtrack ajoute une plus-value non-négligeable à VA-11 Hall-A. Et vous immergera d’autant plus dedans, faisant partie intégrante de la direction artistique du soft. Garoad a su taper fort et juste avec cet ensemble de compositions variées et intéressantes sentant bon la SF délicieusement désuète. Une bande sonore à déguster sans modération en somme !
L’OST de VA-11 Hall-A est disponible en streaming et achat dématérialisé sur Bandcamp. Elle a également été pressée en CD et vinyle.