Fatal Fury

Pour contrecarrer un Capcom inondant les salles d’arcade de son rutilent Street Fighter 2, SNK met sur le marché son premier réel concurrent : Fatal Fury (Garou Densetsu en jap). Sous-titré King of Fighters, ce premier épisode apparaît six mois à peine après le titre de chez Capcom. De quoi ne pas être pris dans la tornade et venir proposer une alternative à des joueurs remis de leurs émotions. Pas simple pourtant de tenir le choc. SNK l’a pourtant fait.

En 1991, les titres de baston se comptent sur les doigts de la main. Street Fighter 2, débarqué depuis mars, a permis de remplir les salles d’arcade, tout autant que le portefeuille de ses créateurs. La maigre concurrence est K.O. et elle tarde à se relever. SNK a toutefois eu la même idée et dévoile un Fatal Fury visuellement très proche. Les sprites, bien que de taille plus mesurée que sur la série des Art of Fighting, apparaissent grands et classieux. FF ne prétend pas disposer d’une plastique de rêve mais son design fait en sorte de nous faire oublier le manque de finition de certains environnements. Paradoxe : le goût du détail et de l’ambiance, que SNK continuera de développer au fil de sa carrière de développeur, saute aux yeux au travers du look des personnages – réellement original – et du cachet de ses décors. Il y a une âme. Chaque round bénéficie d’un rendu différent, marqué soit des changements de conditions climatiques soit de l’heure de la journée (jour – coucher du soleil – nuit). Il ne faut pas non plus oublier le background général de FF. Ce dernier est omniprésent au travers de scénettes intervenant entre chaque combat.

Ce premier volet vous relate l’omnipotence de Geese Howard. Désireux de prendre la tête de la ville de SouthTown et profondément égocentrique, il organise un tournoi pour désigner le King of Fighters, ceci lui permettant de recruter les meilleurs combattants. A l’image de Billy Kane, ancien champion désormais garde du corps du monsieur. En face d’eux, se dressent trois jeunes combattants, Joe Higashi, champion de Muay Thaï voulant devenir l’homme le plus fort au monde, et les frères Bogard, Terry et Andy, assoiffés de vengeance depuis que Geese ait terrassé leur père Jeff. Même s’il figure parmi les précurseurs de ce qui se verra être la référence des jeux de baston, Fatal Fury déçoit sur son casting : seulement 3 personnages jouables. Ils seront opposés à sept autres protagonistes, dont beaucoup deviendront des icônes chez SNK, tels que Raiden (Big Bear une fois le masque tombé à partir de Fatal Fury 2) ou Duck King, et c’est sans compter sur les deux inoubliables boss. D’autant plus dommage que les versions Megadrive et Super Nes les autorisent en Versus… La version Neo Geo n’en propose pas et privilégie un étrange mode coopération, en tout cas pour l’époque : un second joueur peut à tout moment intervenir au cours d’un combat, aidant le premier joueur à démolir son adversaire. S’ils triomphent, les deux joueurs doivent alors se départager pour savoir qui continue l’aventure. Pas question toutefois de combattre Geese en duo, bien évidemment…

Le niveau de difficulté du jeu reste dans la moyenne des jeux d’Arcade des années 90, à savoir bien corsée, mais sans être insurmontable. Pour lutter, vous disposez de trois boutons de coups : A pour les coups de poing, B pour les coups de pied et C pour les chopes, ces dernières requérant une proximité et un timing à s’arracher les cheveux. Ce système amène une liste de coups limitée, épaulée par surpuissance des coups spéciaux, au nombre de quatre par combattant. Bien exécutés, ces derniers peuvent soustraire jusqu’aux deux tiers de la barre de vie adverse. Autant dire que l’envie de camper dans son coin en attendant le bon moment pour déclencher son coup vient vite à l’esprit. Même si les coups normaux font tout de même plus de mal que ce que les épisodes suivants proposeront, permettant de plier les combats en général en une douzaine de secondes maximum. A l’opposé des King of Fighters 98 et plus… En revanche, ce qui constituera une marque de fabrique de la série et qui connaît ses balbutiements dans ce premier volet : les combats sur deux plans. Entièrement contrôlés par l’I.A., ils permettent de passer du premier à l’arrière plan, et vice versa. Vous devez donc attendre que l’ordinateur décide de se déplacer pour le suivre, soit en roulant soit en sautant. Excellente idée, mais mal exploitée ici en raison de son côté aléatoire. A l’instar de son concurrent, Fatal Fury propose des épreuves spéciales vous demandant de remporter plusieurs phases de bras de fer entre les combats. L’occasion de martyriser encore davantage le pad…

Bien que très prometteur et bon pour son époque, le titre de SNK ne réussit pas à faire oublier Street Fighter 2. Casting, coups, personnages jouables, possibilités de jeu, tout semble limité. Sans compter son timing d’horloger pour espérer lancer les quelques coups spéciaux. Il n’en reste pas moins un agréable jeu de combat que le poids des âges n’a finalement pas trop éreinté et qui a su donner naissance à une remarquable série.