Midnight Street Of Rage

Streets of chill

Compositeur originel
Yûzô Koshiro
Réarrangements / Interprétation
Midnight Street
Nombre de pistes
10
Année de sortie
2018

Sur Archaic, il nous arrive parfois de parler d’OSTs de jeux. Mais quid de ceux qui se les réapproprient en les adaptant à leur sauce ? Parce que bon, il faut admettre que ces dernières années, l’exercice s’est pas mal démocratisé et on y trouve de tout, pour tous les goûts. Des musiques de Mario réadaptés en jazz, des musiques de Final Fantasy retravaillés complètement pour n’être joués qu’avec une guitare électrique et une boîte à rythme pour un rendu rock, voire carrément metal ou encore des adaptations purement symphoniques des thèmes emblématiques de Castlevania… Bref, de tout comme je disais, à toutes les échelles d’ambition, du simple guitariste amateur lambda qui nous expose son doigté sur Youtube ou Twitch à de gros collectifs de musiciens professionnels qui allient leur savoir-faire afin d’arriver à un résultat aussi carré que grandiose.

Il y a peu, j’ai été mise en contact avec une formation parisienne nommée Midnight Street, déjà auteur d’un album conceptuel de synthwave très ambient nommé La Fille Tatouée. Entre synthétique et organique, le but est de dépeindre un univers futuriste, entre lieux et narration de l’histoire d’une de ses habitantes. Un projet somme toute ambitieux qui mérite bien une oreille pour la culture, même si ce n’est clairement pas le sujet du jour. Les Parisiens ont décidé cette année de partir sur quelque chose de complètement différent avec Midnight Street Of Rage, un nouvel album de près d’une heure qui reprend, comme le jeu de mot le laisse présager, les thèmes du premier Streets Of Rage. Notez d’ailleurs que l’OST originelle dépoussiérée et remasterisée, composée par Yûzô Koshiro, est parue sous nos latitudes en format CD via Wayô Records.

Ici, rien à voir avec les expérimentations de La Fille Tatouée, on se retrouve davantage dans un exercice de revisite dans le seul but de rendre hommage à un jeu ayant très certainement marqué ses géniteurs, et surtout se faire plaisir. De manière plutôt simple, sans trop de chichis, sans non plus que l’exercice ne se cantonne qu’à une bête reprise risible des originaux. C’est ainsi que Midnight Street Of Rage nous présente des versions à la fois fidèles (je pense que tout le monde reconnaîtra sans mal le thème du premier stage que tous ceux ayant un tant soit peu touché au jeu sur Megadrive ont obligatoirement entendu) mais dont les parti-pris changent l’ambiance globale de manière on ne peut plus radicale. Et le rendu en est fort intéressant, même s’il s’avérera peut-être un peu trop homogène sur la longueur. La faute à un parti-pris qui ne varie pas d’un iota, ni même sur de quelconques changements de sonorités en terme de composantes numériques.

De la même manière que son premier méfait, nous sommes ici à mi-chemin entre l’organique (la section cordes comprenant la guitare et la basse) et le synthétique (le synthé et la boîte à rythmes). Il y a donc eu un vrai travail de retranscription et adaptation afin que les supports réels puissent s’octroyer une place flatteuse sans que le propos ne perde en cohérence par rapport au support originel. De la même manière qu’il a fallu réarranger le synthétique afin que les deux puissent co-exister de manière harmonieuse. Un pari qui a parfaitement été réussi sur Midnight Street Of Rage grâce au parti-pris de partir dans une ligne atmosphérique totalement différente de son pendant originel. La part synthwave a beau être omniprésente, il faut admettre que la part belle s’opère au niveau de la section organique s’articulant autour d’un rendu extrêmement bluesy. Quant à la partie synthétique, elle est utilisée principalement pour amener un certain relief aux ambiances. Ce qui nous donne un ensemble majoritairement calme, très porté sur l’ambient sans jamais que la rythmique ne s’avère spécialement incisive. On est donc ici bien loin des acteurs de synthwave privilégiant les rythmiques au point d’en déboîter les cervicales des metalleux en festival comme c’est le cas avec Carpenter Brut et Perturbator.

Non, le propos reste relativement calme et reposant, même s’il sait très bien augmenter son tempo pour les thèmes plus pêchus. En usitant uniquement du synthé ou de la guitare et non d’une boîte à rythmes plus percutante. Ce qui, en soi, change énormément la donne par rapport au propos de Yûzô Koshiro. Aucune véritable envie de castagne de racailles dans les ruelles d’une banlieue mal famée ne se fait ressentir ici. En revanche, on sent davantage le désir de se poser dans un club de blues cosy, voire carrément luxueux, dans une jolie ville californienne et déguster un bon gin tonic présenté de manière bling-bling avec ce Midnight Street Of Rage en fond sonore. Voire carrément le voir jouer devant nous dans ce même club, en début de soirée, histoire de profiter d’un after-work tout en détente et quiétude.

C’est bien là tout ce qu’il faut attendre de Midnight Street Of Rage : offrir un album offrant de bonnes petites musiques d’ambiance tournant autour de Streets Of Rage pour installer une atmosphère posée. Et non réellement réveiller la flamme du justicier en vous qui voudrait débarrasser les rues mal famées de ses voyous de ses propres poings.

Midnight Street Of Rage est disponible en streaming et téléchargement gratuit sur le Bandcamp du groupe.