Utopiales 2013 – Comptes-rendus des projections (compétition, séances spéciales, documentaires, rétrospectives)

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de Atsushi Takahashi Japon, 2013, 90’, VOSTF
de Atsushi Takahashi
Japon, 2013, 90’, VOSTF

Blue Exorcist the Movie

青の祓魔師(エクソシスト

Rin a été élevé par l’exorciste Shirô Fujimoto. Un jour, le jeune garçon découvre ses origines : il est le fils que Satan a eu avec une femme. Mais pour Rin, impossible de renier l’enseignement qu’il a reçu, et sa seule option est de devenir le meilleur exorciste afin de vaincre son père biologique.

[spoiler intro= »Avis de Hyades Luine » title= »De l’animation classique et efficace »]

Après avoir visionné bien des films très étranges en trois jours d’Utopiales, il est toujours bon de savourer un shônen à l’ancienne. Et c’est Blue Exorcist qui fera office de parenthèse diablement (hu hu) efficace. Au programme : une histoire pas trop compliquée avec un soupçon d’humour et de bons sentiments, une galerie de personnages attachants et des scènes d’action très spectaculaires. Bref, tout ce qu’il faut pour passer un bon moment, surtout quand la réalisation est solide et que le rythme suit. Personnellement, j’ajouterais aux attraits du film un cadre tout en verticalité qui invite au dépaysement avec ce vaste empilement de bâtiments d’âge et de styles divers au sein duquel se prépare un flamboyant festival.

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[spoiler intro= »Avis de Lolita » title= »Super sympa ! »]

Ce film d’animation, issu d’un shonen, pourrait en laisser certains perplexes quant à l’adaptation scénaristique et au trait, d’autant plus que le manga bénéficie déjà d’une adaptation animée en série. Même si je ne connaissais ni le manga ni l’anime et si le synopsis est clairement orienté shonen, je me suis laissé tentée et surtout charmée ! Une petite dose de Kawaii (Lolita Power *_*), une petite dose d’action, une petite dose de fanservice – s’entend décolletés plongeants, grosses poitrines, … – et une bonne petite intrigue : rien de mieux pour passer un bon moment cinématographique !

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[spoiler intro= »Avis de Margoth » title= »Convenu mais efficace »]

Découvrir un manga via un long-métrage qui s’éloigne sensiblement du scénario de la série d’origine comporte bien des avantages : voilà une bonne façon d’appréhender l’univers sans pour autant être spoilé de l’intrigue développée dans le manga. Et en cela, Blue Exorcist The Movie peut faire office d’un savoureux petit apéritif. Car s’il ne casse pas des briques en terme d’originalité, il répond à tous les critères qu’on peut attendre d’un shônen, à savoir action entrecoupée d’humour souvent bête mais faisant toujours mouche pour n’importe qui apprécierait le style. De la même manière, le design reste relativement convenu ainsi que les psychologies de chacun où on aura tôt fait de faire des parallèles avec d’autres œuvres du genre – la femme exorciste très portée sur la bière et le divertissement en général semble porter quelques relents de Misato d’Evangelion par exemple – sans pour autant manquer de personnalité, un bon point afin de pouvoir à la fois rameuter un large public et se démarquer de la masse. Parce qu’une chose est sûre : si Blue Exorcist n’ira pas révolutionner les codes bien ancrés du shônen, il a tout ce qu’il faut pour qu’on en vienne à s’intéresser à lui et creuser davantage la découverte, via la série animée ou le manga papier selon les préférences de chacun. De mon côté en tout cas, la magie a opéré, j’ai obtenu tout ce en quoi je m’attends avec un shônen, à savoir un divertissement facile et sans prise de tête, le dessin m’a agréablement chatouillé la rétine et je suis ressortie de la salle en étant très fortement tentée de me procurer les onze tomes parus dans nos latitudes.

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[spoiler intro= »Avis de Vidok » title= »La vie en bleu »]

Il est toujours compliqué de découvrir un film quand la série nous est inconnue. Paradoxalement, arriver avec un œil neuf peut également permettre de se faire un avis uniquement sur le long-métrage. Il se trouve que Blue Exorcist The Movie peut tout à fait se suffire à lui-même. Un début, une fin, une suite d’événements comportant moult rebondissements et un twist forcément convenu vu le format, mais une ambiance du tonnerre et un héros aussi arrogant qu’il est intéressant à suivre. L’univers dépeint donne fortement envie d’en découvrir davantage.

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de Eiichi Yamamoto Japon, 1973, 89’, VOSTF
de Eiichi Yamamoto
Japon, 1973, 89’, VOSTF

La Belladone de la tristesse

哀しみのベラドンナ

Jeanne, une paysanne, est violée par son seigneur, n’ayant pu obtenir le droit de se marier avec son amour, Jean, faute d’argent.

Tout deux sont chassés du château, et Jean la dédaigne. Mais le diable séduit Jeanne et en fait une sorcière puissante…

[spoiler intro= »Avis de Hyades Luine » title= »Belladona… »]

Dès la présentation du film, le ton a été donné : un film d’animation japonais de 1973 hyper-confidentiel, une dose non négligeable de sexualité et des thèmes durs, une technique qui exploite à l’envi de longs plans sur des artworks très peu animés mais qui s’inspirent de grands peintres comme Gustav Klimt… Pour reprendre les mots de notre présentateur, assister à une projection de La Belladone de la Tristesse fait partie de ces expériences à la suite desquelles on peut s’exclamer « j’y étais ! » Nous y étions donc, au milieu d’un tourbillon de symbolique érotique et d’imagerie seventies, plongés dans l’histoire un poil déprimante de Jeanne, dont le mariage avec Jean prêterait à sourire s’il ne trouvait pas un dénouement aussi sordide entre viols et harcèlement constant. La Belladone de la Tristesse est la plongée en enfers incessante, pendant près d’une heure et demie, d’une femme dans un univers qui ne les aime vraiment pas. Loin d’inviter au désir charnel, on sent plutôt poindre dans le film le quasi-manifeste féministe, la plupart du temps simplement bizarre, mais parfois nourri de scènes à la symbolique brillante. Bref, un film à la fois étrange et troublant, qui surprend par son propos et sa réalisation et que l’on est bien en peine de classer.

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[spoiler intro= »Avis de Margoth » title= »La Belladone de l’intégrité mentale »]

Aussi intrigant que déroutant, la Belladone de la Tristesse fait office de véritable OVNI. Comptez en plus qu’il s’agit d’une véritable rareté dont on n’aurait jamais soupçonné l’existence, voilà qui donne une bonne raison de se ruer dans la salle. Suite aux conseils de mes collègues Mizakido et Hyades l’ayant visionné la veille, j’ai décidé de faire l’impasse sur la conférence du visual novel pour assister à la petite session de rattrapage de cette étrangeté psychédélique. Et grand bien m’en a pris tant la surprise était de taille. Dans le bon sens du terme. Sans aller dire que cela deviendra un de mes films de chevet, il fera office de révélation tant pour ces Utopiales-ci que pour le monde plus global de l’animation japonaise. Parce qu’honnêtement, jamais je n’aurais cru voir une production du pays du Soleil Levant aborder des thématiques aussi dures que celles du viol et de la sexualité en général avec une approche aussi crue. Pas que le côté direct et coup de poing soit là vu que le parti-pris est donné aux images et métaphores mais on ne peut pas non plus dire pour autant que ces dernières soient forcément très fines et subtiles. « Tu ne résisteras pas longtemps à mon grand pillon » clamait Satan, le ton est donné et le film en devient détonnant. Et les conséquences ont tôt fait d’apparaître : difficile de rester de marbre face à cette effusion d’images souvent crayonnées, dotées d’une animation minimaliste. Le public ne s’y est d’ailleurs pas trompé : l’oeuvre est tellement singulière qu’elle a eu tôt fait de trier les spectateurs sur le volet, une bonne nuée s’étant fait la malle avant même que l’on dépasse le quart de la durée totale. Tant pis pour eux car on finit vite par se retrouver immerger dans un bon trip sous acide. Même si la Belladone s’empoisonne elle-même par quelques longueurs dommageables, certaines séquences sont juste magnifiques. On s’extasie autant qu’on hallucine, on se trouve autant hypnotisé que pris en proie d’un certain malaise. Bref, un film qui se doit d’être vu au moins une fois, ne serait-ce que pour la curiosité de l’expérience. L’appréciation, elle, variera selon les têtes mais si des œuvres telles que The Wall de Pink Floyd ne vous refroidissent pas, nul doute que la Belladone de la Tristesse arrivera à se frayer une petite place au sein de vos bonnes grâces.

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[spoiler intro= »Avis de Mizakido » title= »A voir au moins une fois. »]

What the… Voilà probablement l’oeuvre la plus curieuse qu’il m’ait été possible de voir durant ces Utopiales. Se présentant comme le dernier volet de la trilogie Animerama, fruit de la collaboration entre feu le studio Mushi Production et Maître Tezuka (qui ne participera pas d’ailleurs à celui-ci) est un objet atypique, bizarre, mais particulièrement intéressant. Basé sur une nouvelle française racontant une histoire de sorcières, il se mêle dans ce film d’animation des années 70 de simples plans aux dessins soit magnifiques, soit absolument abominables esthétiquement, très souvent saupoudrées de scènes plutôt malsaines, toujours psychédéliques, apparemment érotiques, sur fond de musique très typée Jefferson Airplane (que j’adore). On en ressort, au final, un peu hébété, par toutes ses images qui ont défilé devant nos yeux, en ayant eu le sentiment d’avoir vu un objet très inintéressant, mais en même temps difficile à conseiller. Ah oui, et que la consommation de drogues, c’est mal. Beellaaddoonnaa !

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de Makoto Shinkai Japon, 2013, 89’, VOSTF
de Makoto Shinkai
Japon, 2013, 59’, VOSTF

The Garden of Words

言の葉の庭

Takao, apprenti cordonnier, sèche les cours les jours de pluie. Dans un jardin de style japonais, il rencontre une mystérieuse femme, plus âgée que lui. Alors que la saison des pluies commence, ils partagent tous les deux, malgré leur différence d’âge, de simples moments de complicité.

[spoiler intro= »Avis de Hyades Luine » title= »Un peu d’émotion dans ce monde de brutes »]

Après Voyage vers Agartha l’année dernière, les Utopiales ont remis à l’honneur les œuvres de Makoto Shinkai pour finir de belle manière l’édition 2013. Plus caractéristique de son style habituel selon notre spécialiste Mizakido, The Garden of Words est radicalement différent et substitue au voyage fantastique une histoire plus romantique et plus intimiste, bercée par la pluie d’un Tokyo contemporain. Au final, le film est une romance pleine de poésie et agréable à suivre par sa retenue dont elle se départit malheureusement un peu trop sur la fin. Le tout reste solide (quoiqu’un peu court) et est servi par une réalisation de haute volée.

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[spoiler intro= »Avis de Lolita » title= »C’est beauuuu ! »]

Si le synopsis n’est pas plus attirant que ça, ce film d’animation aux accents purement shôjo est pourtant très agréable à voir. Attention, âmes sensibles, pensez aux mouchoirs ! Si l’histoire n’a rien de révolutionnaire sur le fond – c’est l’histoire d’un lycéen, passionné pour les chaussures (il veut être chausseur !) qui sèche les cours et rencontre une jeune femme, a priori une working-girl, qui fait l’entreprise buissonnière. Vous me direz, ce sont les bases de beaucoup de shôjo, et vous aurez raison, néanmoins on finit par vite s’attacher à ces deux personnages un peu blessés par la vie … Je regrette tout de même l’amer goût d’inachevé à la fin … Soit il manque un bon quart d’heure (d’ailleurs c’est ce qu’annonçait la programmation des Utopiales), soit il manque le film n°2. En attendant, la suite – ou pas … – vous découvrirez avec The Garden of Words le Tokyo des parcs si peu exploité dans les anime et pourtant si merveilleux.

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[spoiler intro= »Avis de Margoth » title= »Guimauve jetable »]

A n’en point douter, The Garden Of Words a de quoi faire vibrer les cordes les plus sensibles des cœurs d’artichaut. Premier constat : diantre que le film est beau sur un plan esthétique. Second constat : que de poésie. Malgré tout, les quarante-cinq minutes fleurant bon l’odeur de trop peu et d’inachevé ainsi qu’un manque cruel d’action – terme à ne pas prendre dans son sens premier dans ce contexte mais plutôt comme la cruelle absence d’élément perturbateur significatif donnant l’impression de baigner dans le flot d’un long fleuve tranquille, voire complètement figé – a eu raison de tant de beauté presque onirique. Attention, je n’ai rien contre l’eau de rose mais même si une guimauve se doit d’être moelleuse pour être goûtue, trop de mollesse ne la rend pas meilleure pour autant. Au contraire, il lui faut un minimum d’élasticité afin qu’elle reprenne sa forme d’origine après l’avoir tassée. En ce qui concerne The Garden Of Words, on peut dire qu’il s’affaisse dans les bons sentiments larmoyants mais jamais ne reprend forme. Et à l’instar du sommier usé d’un vieux lit, on ne peut pas dire que j’en soit ressortie avec bon dos. Certes, je n’en suis pas forcément restée totalement de marbre, j’ai même bel et bien eu de l’émotion à certains moments. Le souci est que le tout m’a semblé jetable, la platitude se faisant tellement ressentir que le potentiel ne semble présent qu’à usage unique. A voir éventuellement une fois.

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[spoiler intro= »Avis de Mizakido » title= »Oui c’est guimauve et alors?! »]

Un nouveau Makoto Shinkai, hourra ! Je n’en donne pas l’air, mais je suis un très grand fan du monsieur, et tout fan est très critique… D’où ma petite déception avec Voyage vers Agartha, justement vu aux Utopiales de l’année précédente. Le réalisateur nous revient avec ce qu’il sait faire de mieux, à savoir de la romance et une bonne tranche de vie, et nous sert ici une histoire touchante entre deux personnes littéralement paumés dans leur existence, et qui vont s’aider à repartir avec au début, de tout petits rien, pour aller vers une relation plus poussée… Un film très court, intimiste, avec comme d’habitude une technique et une patte artistique superbe. Voir (ou revoir) Tokyo, sous la pluie, avec cette palette de couleur… C’est tout juste superbe. Et un peu guimauve comme dirons certains. Mais j’assume.

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[spoiler intro= »Avis de Vidok » title= »Euh…il ne manquerait pas des minutes ? »]

Chaque nouveau Makoto Shinkai est devenu un événement. Le réalisateur japonais est désormais réputé pour sa retransmission des sentiments humains à l’écran. Avec The Garden of Words, il met en scène, si l’on peut dire, deux personnages centraux. Le premier est un étudiant de 15 ans passionné par son rêve de devenir chausseur mais déçu des réactions de son entourage, essentiellement professeurs et mère. Le second est une jeune femme, de 12 ans son aîné, récemment divorcée, qui ne semble plus réellement prendre goût à la vie. Ces deux personnages dont rien ne rapproche, vont pourtant se retrouver tous deux dans un petit jardin les jours de pluie. Fortuitement au départ, puis de manière calculée et planifiée. Makoto Shinkai ne s’arrête réellement que sur eux deux, pendant un peu moins d’une heure, où le spectateur se demande sans cesse jusqu’où les scénaristes sont allés. Et sans rien révéler, il faut reconnaître que le côté guimauve de The Garden of Words a de quoi émoustiller les plus endurcis. Makoto Shinkai n’usurpe pas sa réputation ; malheureusement, l’abus de musique grandiloquente et, comme diraient certains, « abusée » décrédibilise quelque peu certaines scènes. Pas de quoi descendre l’œuvre, plutôt modeste mais incroyablement belle.

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