Alice : Retour au pays de la folie

Une expérience qui ne laisse pas de marbre

Vous vous doutez bien qu’en proposant d’aborder des thématiques aussi graves, Alice : Retour au pays de la folie n’est pas un jeu qui laissera l’assistance indifférente. Sa jaquette se voit même ornée d’un magnifique 18+ et rassurez-vous, il les vaut bien. La faute à ces thématiques bien entendu mais on peut aussi y inclure toute la dimension empathique que le joueur se trouvera confronté à ressentir devant son écran. Un véritable effort d’immersion a été mis en œuvre pour outrepasser le simple divertissement. On mène là une véritable expérience d’une intensité rare et il n’est pas rare de se pincer pour vérifier si l’on ne finira pas par tomber dans le même état que la jeune Alice, à savoir totalement cinglé.

Car ce qu’on voit à l’écran, on les voit par le biais des yeux de l’héroïne quant bien même on ne soit pas en vue subjective. C’est sa perception et uniquement qui rentre en ligne de compte tout comme on en vient à ressentir ses propres sentiments durant notre avancée. Si on disait tout à l’heure que les différents univers présentés ne jouissaient pas tous de la même réussite visuelle, allant du sublime au sympathique, tous par contre sont pourvus d’atmosphères palpables. C’est ainsi que des décors moins réussis attireront tellement notre attention grâce à ses ambiances qu’ils nous donneront l’impression de faire partie des points culminants du jeu. Il n’y a qu’à voir notre traversée du château de la Reine. Une lourdeur atroce renforcée par l’immensité exagérée de l’architecture, un sentiment d’oppression permanent à s’en demander si on ne finira pas par devenir totalement claustrophobe. Non, vraiment, se balader dans le jeu de Spicy Horse, ce n’est pas vraiment une promenade de santé dans les champs fleuris où le soleil brille et les oiseaux chantent. On commence peut-être doucement avec une jolie Vallée pouvant s’apparenter à une sorte d’Éden avant de finir par se demander où sont les frontières entre fantasme et réalité. Frontières pourtant très bien délimitées en début de jeu pour s’entremêler au fur-et-à mesure de notre aventure au même titre qu’une pathologie psychiatrique.

Ce ne sont pas les souvenirs que l’on ramasse en chemin qui viendront plus nous rassurer tant leur révélation assure un soutien vital à l’immersion du jeu. Des reviviscences soudaines scandées sans crier gare, parfois essentielles pour comprendre l’horrible tragédie des Liddell, parfois totalement à côté de la plaque. Tantôt amusants, tantôt sans intérêt, tantôt horripilants, ces souvenirs rythmeront nos pas et ne feront que créer un lien plus étroit entre nous et Alice. Prendre connaissance de ses petits bouts de son passé nous fait entrer directement entrer dans l’intimité du personnage jusqu’à ce que ce dernier et le joueur n’en devienne qu’un. C’est ainsi qu’au final, il est très difficile de ne pas ressortir d’Alice : Retour au pays de la folie complètement chamboulé. Cette aventure, on y a mis de notre être dedans et on y a vraiment laissé nos tripes jusqu’aux révélations finales extrêmement bien fichues malgré le fait qu’elles soient vraiment gerbatives – ou simplement tord-boyaux pour les moins sensibles.

[section id= »conclusion » style= »border:1px solid white;padding:10px;overflow:auto;background-color:#00a0db;color:#FFFFFF; »]Vous l’aurez compris, Alice : Retour au pays de la folie n’est pas un jeu où il ne faut se fier qu’à sa carcasse rouillée et sa démarche un peu gauche. Si le jeu donne de prime abord l’impression de n’avoir affaire qu’à une vieille guimbarde branlante, force est d’admettre qu’au travers la vieillesse de sa technique, il y a encore de superbes restes. Il serait fort dommage de se contenter uniquement des apparences sous prétexte de louper une des meilleures lectures d’Alice In Wonderland et une expérience vidéo-ludique prouvant ardemment que le jeu vidéo n’est pas forcément rattaché qu’au divertissement. Il peut aussi être une forme plus emprunte de l’art – pour ne pas dire carrément – et en cela, ça ne fait aucun doute, la suite d’American McGee’s Alice est un chef-d’œuvre par delà ses failles, tout simplement.[/section]

 

[tabs tab_names= »Trailer|Intro » initial= »1″]
[tab][youtube width= »560″ height= »315″]https://www.youtube.com/watch?v=jn7rStiRFKM[/youtube][/tab]
[tab][youtube width= »560″ height= »315″]https://www.youtube.com/watch?v=UqZr92vd4aw[/youtube][/tab]
[/tabs]

Précédent 1 2 3

  1. Et bien en voilà un beau papier, bien dense ! Merci.

    Pour ma part voici l’un des jeux que j’ai préféré en 2011. Je trouve que tu est très très dure sur l’aspect technique.
    Voilà les conditions dans lesquelles je l’ai fait : version PC et mode difficile. Et bien je n’ai pas arrêté de m’exclamer sur le beauté du jeu. Je préfère 1000 fois un jeu qui a un moteur un peu vieillot mais une direction artistique aussi aboutie, qu’un jeu full Unreal Egine 3 avecc la direcion artistique d’un Gears of War ou Call of:p

    Ensuite je pense qu’il faut louer sa durée de vie. A notre époque, un jeu de platefome/aventure qui se boucle en 15 heures en moyenne (18 heures pour moi), ce n’est pas du luxe.
    Et enfin je trouve que ce jeu comporte des idées de gameplay lumineuses, dont on parle peu, à cause de cette foutue catégorisation des genres. J’ai trouvé les combats plutôt pêchus et stylés globalement, et le fait de pouvoir faire tanker les petits lapins, entre autres, donne une façon d’aborder les combats que personnellement je n’avais jamais vue ailleurs.

    Il ne faut pas oublier qu’American McGee a débuté en tant que level designer chez ID Software, sur des jeux précurseurs comme Doom ou d’autres monuments de ce genre. Son jeu comporte beaucoup plus d’idées de gamedesign, level design et gameplay que ce qu’on pourrait croire. Le genre « classique » auquel appartient le jeu, fait passer ses mécaniques comme du déjà vu. Mais éculés comme propres au jeu, ces mécanismes forment un tout d’un niveau conceptuel vraiment rarement atteint sur cette génération de consoles.

    Je pense que c’est typiquement le genre de jeu dont la réputation souffre de la catégorisation des genres. Moi je l’ai pris pour ce qu’il est, et j’ai passé 18 heures de rêves à traverser des univers, des décors, des niveaux différents, tout en prenant mon pied sur des combats pêchus, aussi agréables à jouer qu’à regarder.
    Dommage que tant de gens soient passés à côté, comme d’habitude.

  2. Je dois avouer que j’hésite toujours à me lancer dans ce jeu tant je me suis emmerdé sur le premier épisode.

    En tout cas, bon papier, même s’il ne m’encourage pas forcément à passer le pas.

  3. J’ai eu énormément de mal à rentrer dans la critique étant donné les fautes, oublis de mots ou encore les répétitions, mais je salue malgré tout l’effort d’avoir rédigé un aussi gros billet.

    De la même manière que Céd, je te trouve particulièrement dure au niveau de la technique de Madness Returns (dans le cas du premier opus c’est largement compréhensible, il était atrocement laid), car outre la patte artistique absolument sublime que je n’irai pas confondre, il y a aussi de très belles utilisations de l’Unreal Engine 3 pour le coup. Je pense notamment aux éclairages, lumières diffuses, effets de smoke ou encore de particules. La modélisation en elle même correspond a une utilisation assez basique de l’UE3, mais elle reste dans la moyenne des jeux de cette génération. Le seul aspect qui pêche peut-être un peu à mon sens concerne l’animation, mais ce n’est pas non plus particulièrement notable.

    Du reste je rejoins les paroles de Céd concernant le gameplay. Il y a bien plus à voir et à apprendre que ce que l’on pourrait croire, notamment en terme de Level Design et de rythmique des affrontements, sans parler de la balance puzzle/plateforme/combats très bien équilibrée.

    Enfin une chose à noter aussi et pour laquelle peu de joueurs sont au courant : L’histoire d’Alice et l’univers des jeux sont en réalité partiellement inspirés de l’histoire d’American Mcgee lui même. Lorsqu’il avait 13 ans, son père complètement ivre a tenté de le tuer en l’étranglant et en lui crevant les yeux, et par dessus le marché sa mère avait aussi plus ou moins un grain. Du côté la série n’a clairement pas volée son identité, et ça se ressent d’ailleurs très rapidement.

    > Mogfa : Sincèrement Madness Returns n’a juste rien à voir avec le premier d’un point de vu rythme, maniabilité, affrontements, et surtout artistiquement parlant. Du coup tu devrais plutôt le voir comme un nouveau jeu à part (ou presque).

  4. @ Altraum : Alors, quand j’ai vu ton commentaire, je suis restée perplexe et après avoir relu le billet, je le suis d’autant plus. Je suis peut-être aveugle mais je ne vois pas spécialement de fautes comme tu l’as dit, hormis un ou deux passages avec répétitions (que je vais corriger d’ici pas longtemps). Enfin, je me trompe peut-être, qu’on n’hésite pas à le dire si je me trompe et que la critique est truffée de fautes :sweat: Mais autrement, merci pour ces informations complémentaires que j’ignorais. Après, j’avoue que le côté « fidélité » avec l’esprit originel de l’œuvre, je le voyais beaucoup pour la pédophilie abordée, Lewis Caroll ayant été fréquemment pointé du doigt avec cette accusation à cause d’une certaine fascination pour les jeunes filles qui ont découlé sur des clichés lui ayant valu des rumeurs non-fondées de pédophilie.

    @ Altraum et Lced : Le jour où mon avis sera irréprochable sous tout rapport hein :mrgreen: … A vrai dire, si j’ai commencé à parler de la technique, c’était dans le but qu’on n’y prête pas une importance capitale (le fait d’avoir tout le reste après noie quelque peu le poisson si je peux dire). D’ailleurs, mon appréciation au final ne s’en ressent pas spécialement, ce qui signifie que je n’étais pas si dure que ça par rapport à ce point. Après, j’admets que la demi-étoile qui l’éloigne de l’appréciation maximale provient bien d’un problème technique qui m’a gêné tout le long du jeu : cette foutue caméra durant les combats qui m’a vraiment tapé sur le système jusqu’à ne pas apprécier à leur juste valeur toutes ces phases d’affrontement. Pour les autres bémols techniques pointés du doigt, ils sont bien là mais n’obscurcissent à mon sens pas le jeu dans le sens où même si ça choque quelque peu au début, on finit néanmoins par faire avec et s’y habituer. Bref, j’ai peut-être dénoncé le plan technique, il ne faut tout de même pas en faire une telle fixette, je l’ai fait car on ne peut cacher que ça crève les yeux mais de mon côté, cela n’a pas eu autant de poids dans le constat final comme ça a pu l’être ailleurs (« c’est moche, c’est vieillot, le jeu est donc pourri » pour résumer grossièrement ce que j’avais pu voir parfois).

    Après, pour le reste de ce que vous dites, je n’irai pas vous contredire mais je vous l’avoue très franchement : ça m’importe peu. Je suis quelqu’un qui prête importance au feeling dès lors que j’ai la manette en main mais pas à toutes ces subtilités techniques et de gameplay que vous me citez là. Ce qui est d’autant plus vrai avec un tel jeu où je me suis laissée entraînée émotionnellement parlant très loin au point que mon attention s’est principalement porté là-dessus. Bon, après, vous pourrez aller dire que ça fait de moi une gameuse en carton mais j’assume cette perception du jeu vidéo un peu particulière que j’ai et qui est vraiment éloignée d’autres perceptions qu’ont les joueurs qui s’attardent bien plus sur ces domaines que vous traitez. Choses qui, je l’avoue d’emblée, me semblent bien abstraites contrairement à vous.

    Mais bon, il me semble Lced que tu avais prévu de faire toi-même une critique du jeu. Si c’est toujours d’actualité, c’est l’occasion de développer bien plus ton point de vue – et satisfaire sans doute Altraum 😉 – et t’en donner à cœur joie étant donné que je t’ai laissé des brèches béantes de points à aborder qui ne l’ont pas été ici (ou qui n’ont été que partiels).

  5. Ah ah, pour un peu tu me donnerais envie. Altraum nous avait déjà largement fait la publicité du jeu à l’époque de sa sortie mais je n’avais pas sauté le pas. Tant de choses à faire et si peu de temps, en somme.

    Le seul problème que je pourrais avoir, c’est avec les bugs et autres soucis de finition et d’affichage. Ensuite, être d’un niveau technique équivalent à celui de la PS2 n’a jamais empêché un jeu d’être une tuerie, j’en veux pour preuve d’innombrables jeux PS2 ou Deadly Premotion. Mais tout ce qui est tearing et compagnie, ça nuit sérieusement à mon immersion. Ca n’est pas trop prononcé ?

  6. Bonne relecture d’un conte que l’on pensait reconnaître! Le jeu n’est en soi pas si convivial que cela (un peu répétitif) mais l’ambiance est imbattable. Comme quoi, il est toujours possible de se réapproprier les contes pour enfants!
    Je me souviens qu’il y avait eu un film en projet réalisé par Wes Craven il y a quelques années. J’aimerais bien voir ce que cela pourrait donner même si le risque est d’en faire un film d’action sanglant stupide.

    A propos, un troisième jeu intitulé Alice in Otherland est en projet! Une pétition a été lancée : http://www.thepetitionsite.com/372/809/248/make-american-mcgees-alice-in-otherland-a-reality/

  7. Sincèrement, quand il est sorti, j’ai beaucoup hésité sur le fait que je devais le prendre ou non. En lisant ton article, je suis assez contente de ne pas l’avoir fait… Maintenant, je pense que ça dépend des goûts de chacun.

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *