Ces pnjs qui nous prennent par la main

Les mignons

Pour finir ce tour d’horizon des « aides de jeu sur pattes », on trouve la famille des « mignons ». Leur représentation récurrente de petites créatures, est un croisement des lutins besogneux de certaines mythologies et du fameux personnage type Jimini Cricket : le pendant innocent, pur et neutre de l’univers dans lequel se déroule l’histoire. De ma mémoire ressurgit la petite Friday de Landstalker (Mega Drive), une cousine de Navi la fée d’Ocarina of Time. Elles correspondent à peu près au même « format » que Lakitu Lakitu, le caméraman volant des Mario. Entre explications de commandes, mises en évidence d’emplacements dans l’environnement et exclamations catastrophées sur la misère de la situation : que ferait-on aujourd’hui sans ces petits êtres si précieux ? Force est de constater que leur présence ne date pas d’hier. Avec la disparition inexorable des notices de jeux, ces tutoriaux volatiles sont plus que jamais utiles!

En voilà un qui aura traversé les époques…
On trouve foule de personnifications de ce genre pour les mécaniques de jeu en petites créatures touchantes, et les évoquer toutes serait impossible. Cela peut être une sorte de faction neutre dans l’univers du jeu qui aurait trouvé un créneau d’intérêt général : courrier, marchandises, transports. Les Moogles de Final Fantasy III et IX ou les Felynes de Monster Huntern’ont pas signé, à mon avis, leur dernier contrat ! Nous retiendrons simplement que la nécessité de livrer des explications, de prendre le joueur par la main ou d’accompagner de manière plus « neutre » les joueurs que dans les cas exposés plus haut, incite les développeurs à imaginer foule de solutions qui participent aussi bien à la mise en condition du joueur qu’à la richesse foisonnante de l’univers.

L’implantation de ces guides de jeu « In Game », reste malgré tout une solution assez hybride. En effet, ces PNJs qui nous accompagnent ne remplacent pas totalement les aides contextuelles ou les boîtes de dialogues fortuites qui viennent expliquer tel ou tel point du gameplay. Dire que l’on se dirige vers des solutions qui feront disparaître totalement toute interface contextuelle concernant le gameplay me paraît tout de même difficile. Un certain nombre de productions aspirent à un rendu plus cinématographique de l’espace de jeu tout en indiquant les clés de la progression au joueur par des procédés toujours plus intégrés à l’univers. Cependant, le concept du PNJ accompagnateur trouve ses limites dans la cohérence des ses paroles qui se situent quelque part entre l’univers de l’aventure et la matérialité du pad que tient le joueur.

« Maintiens le bouton A pour faire un super saut avec tes ailes démoniaques de l’ombre » ou « Snake si tu veux  monter ou descendre une échelle, appuie sur le bouton d’action pour saisir l’échelle» .

On ne peut pas dire que cela soit très immersif, mais il est indéniable que quelque chose se produit. Une alchimie entre l’imagination du joueur, la mécanique du jeu et l’univers dans lequel on évolue.
En l’état actuel des choses, il serait amusant de tenter d’établir une liste non pas de jeux dans lesquels on est accompagné, mais plutôt de ceux dans lesquels on ne l’est pas. La question serait alors : cette dérogation à ce qui pourrait être qualifié de récurrent relèverait-elle d’un archaïsme du dispositif d’immersion ? D’un choix artistique marginal justifié (la solitude ou l’angoisse, par exemple) ? Il serait intéressant de savoir si les développeurs qui mettent en place les éléments de base les plus évidents d’un jeu vidéo (style de musique, genre de jeu, caractères typographiques de l’écran titre, place du bouton de saut, etc…) intègrent par défaut cette notion de « personnage accompagnateur »,  domaine dans lequel chaque équipe de développement aurait son département de spécialistes (soyons fous !)

Friday (Landstalker), ma première expérience de « petite fée qui me dit » tout dans un jeu.
Conclusion :

Nous arrivons au bout de cet article, et ma nostalgie est à son comble. Car en remettant en perspective de la sorte un certain nombre (non exhaustif, j’assume !) de références, on se rend compte des effets qui évoluent, mais aussi de ce qui perdure. On en comprend les nécessités : accompagner le joueur pour qu’il ne soit pas perdu, donner du corps à l’univers et à son héros, répercuter la psychologie du personnage principal à travers toutes sortes de prismes pour que le joueur prenne conscience de son appartenance à l’histoire, le temps de sa partie. C’est dans ce genre de confrontations que je trouve, finalement, un intérêt majeur dans le retrogaming et la persistance de certaines références vidéoludiques à travers les différentes générations de consoles.
La seule ambition de cet article était de mettre en évidence un enjeu du game design qui m’aura intéressé et de tenter d’en dégager, à mon niveau de joueur, les tenants et aboutissants à travers des familles de tendances en terme de solutions au problème de l’immersion. En espérant sincèrement que le plaisir que prendront les masochistes passants régulièrement sur Archaic à lire ce papier puisse être à la hauteur du plaisir que j’ai eu à rédiger cette synthèse, résultat d’un questionnement très personnel. Votre serviteur apprécie votre patience, et vos venues régulières continuent à motiver l’équipe d’Archaic. Je vous souhaite, à mon tour, une bonne rentrée.